Impasse budgétaire - L’espoir d’un accord s’éloigne une fois de plus

Le suspense perdure. Moins de 30 heures avant que les États-Unis ne se trouvent en cessation de paiement, la Chambre des représentants a reporté sine die, mardi soir, son vote sur un projet de loi autorisant un relèvement temporaire du plafond de la dette ainsi que le financement jusqu’à la mi-décembre des opérations de l’État fédéral, qui est paralysé depuis deux semaines.
Le projet, auquel le Sénat à majorité démocrate aurait peut-être opposé une fin de non-recevoir de toute façon, n’a pas bénéficié d’un soutien suffisant du côté de la frange ultraconservatrice du Parti républicain, maître de la Chambre basse, pour y être mis aux voix.
Cette aile droite du Grand Old Party (GOP), identifiée au Tea Party, a ainsi douché une fois de plus l’espoir qu’une entente au Congrès puisse remettre les fonctionnaires au travail tout en évitant une cessation de paiement dont les conséquences pour l’économie et les marchés financiers pourraient être funestes au dire de plusieurs spécialistes. Une agence de notation a même menacé mardi d’abaisser la note de la dette américaine.
Le dernier plan de sortie de crise élaboré à la Chambre des représentants contenait une clause voulant que les élus fédéraux, président, vice-président, sénateurs et représentants, n’aient plus droit à leur allocation pour les soins de santé, ce qui les aurait obligés à acheter comme les autres citoyens leurs polices d’assurance maladie en utilisant les mécanismes mis en place par le nouveau régime appelé Obamacare.
C’est l’opposition farouche des « Tea Partiers » à ce régime qui a empêché l’adoption d’un budget pour l’année fiscale en cours, et provoqué la nouvelle crise qui secoue les États-Unis.
Plusieurs ministères et agences sont pratiquement fermés depuis le début du mois. Le département du Trésor prévoit qu’il aura atteint jeudi la limite fixée par la loi pour sa dette globale, ce qui l’empêchera bientôt de payer les intérêts sur ses emprunts ou de rembourser ceux qui sont arrivés à échéance.
Ces derniers jours, l’espoir d’une entente au Congrès a évolué en dents de scie, ce qu’ont reflété les principaux indices boursiers. Lundi, il était question d’une entente imminente au Sénat. La Chambre haute était encore proche d’un accord bipartisan au milieu de la journée de mardi, mais les négociations entre sénateurs démocrates et républicains ont été suspendues lorsqu’on a pris connaissance d’un premier projet de loi émanant de la Chambre des représentants, lequel était carrément inacceptable aux yeux des démocrates.
Boehner pris en tenaille
Au milieu de l’après-midi, le chef des républicains à la Chambre basse, John Boehner, a noté qu’il y avait « beaucoup d’opinions », ce qui rendait une décision difficile.
M. Boehner se trouve pris en tenaille entre sa volonté d’empêcher une nouvelle crise économique, pour laquelle son parti serait largement blâmé, et l’intransigeance de son aile droite, qui fait tout pour tailler en pièces l’Obamacare.
Les démocrates sont majoritaires au Sénat, tandis que les républicains contrôlent la Chambre basse. Cette dernière compte plusieurs partisans du Tea Party, qui ont été élus aux élections de 2010 et de 2012.
Le plan qui devait être soumis au vote de la Chambre des représentants différait de celui préparé le matin même par les dirigeants républicains. Le premier était du goût des ultraconservateurs, et le second jugé trop timide par ces derniers.
La Maison-Blanche accuse régulièrement les républicains de la Chambre des représentants de prendre le budget et le plafond de la dette en otage afin de démolir l’Obamacare, qu’ils ne peuvent pas abroger directement par voie législative.
Plusieurs élus démocrates les ont accusés de partisanerie mardi. « Tout s’est effondré », a déploré la sénatrice démocrate de la Californie, Dianne Feinstein, se disant « effarée par la réaction à la Chambre ».
Avant elle, le chef de la majorité démocrate au Sénat, Harry Reid, avait qualifié la première proposition républicaine « d’attaque en règle contre la coopération entre les deux partis ».
En début de soirée, l’agence Fitch a annoncé qu’elle envisageait de retirer à la dette souveraine des États-Unis sa note exemplaire de AAA. L’institution a fait remarquer que « les autorités américaines n’ont pas relevé le plafond de la dette en temps voulu, avant que le Trésor n’épuise ses mesures extraordinaires ». Le dernier plan concocté par les républicains de la Chambre des représentants prévoit justement de retirer au Trésor la possibilité qu’il a de retarder certains paiements au profit d’autres, dont le défaut aurait les conséquences les plus graves.
Les Bourses américaines ont fini la journée en baisse, le Dow Jones perdant 0,88 % et le Nasdaq, 0,56 %.
Avec l’Agence France-Presse et l’Associated Press