Guerre en Afghanistan - Petraeus entrevoit des «zones de progrès»

Le général David Petraeus, le 15 juillet à Kaboul
Photo: Agence France-Presse (photo) Shah Marai Le général David Petraeus, le 15 juillet à Kaboul

Le commandant des forces américaines et internationales en Afghanistan, David Petraeus, se réserve le droit de dire à Barack Obama qu'un retrait du pays à partir de juillet 2011, comme prévu par le président américain, serait prématuré. Ses remarques interviennent au moment où le soutien des Américains pour l'engagement des États-Unis en Afghanistan est au plus bas et alors que le nombre de soldats tués a atteint le nombre mensuel record de 66 en juillet. Le général David Petraeus entrevoit des «zones de progrès» dans la guerre en Afghanistan tout en estimant que l'objectif fixé par Barack Obama d'un début de retrait des forces américaines en juillet 2011 dépendrait des conditions à ce moment-là.

Lors de l'émission Meet the Press diffusée hier sur NBC, le nouveau commandant des forces américaines et alliées souligne que la guerre contre les taliban comporte «des hauts et des bas» et qu'il serait prématuré de parler de succès.

«Il y a des zones de progrès. Il nous reste à les relier les unes aux autres et à les agrandir», explique le général, qui souhaite donner au président «ses meilleurs conseils de professionnel en matière de guerre» tout en lui laissant la responsabilité politique de la conduite de la guerre.

Barack Obama, qui devra affronter en novembre de difficiles élections de mi-mandat au Capitole, envisage de revoir en décembre sa stratégie pour l'Afghanistan. Le Congrès a soutenu ses plans visant à renforcer les effectifs américains dans ce pays mais les sondages montrent que l'opinion publique reste sceptique sur les efforts de guerre.

Les chefs militaires américains ont prévenu que la situation risquait de s'aggraver cette année sur le terrain alors que les forces alliées s'apprêtent à passer à l'offensive pour reprendre des bastions ennemis dans le Sud.

«Prématuré»

«Ce serait prématuré de faire la moindre évaluation à ce stade sur ce que nous pourrions réaliser ou non», a dit le général, qui a précisé à propos du président: «Il a très clairement dit qu'il attendait de moi les meilleurs conseils en termes professionnels.»

Il reste beaucoup à faire au-delà des progrès enregistrés au printemps, a-t-il dit. «Nous sommes ici pour que l'Afghanistan ne redevienne pas un sanctuaire pour extrémistes de tous les pays, comme ce fut le cas dans la région de Kandahar lors des préparatifs par al-Qaïda des attentats du 11 septembre 2001.»

Le général Petraeus a également indiqué envisager à terme une éventuelle réconciliation avec certains talibans. Il a indiqué qu'une nouvelle politique de réintégration des combattants talibans et de réconciliation en Afghanistan était «assez imminente». Le général a par ailleurs précisé dans une interview au Washington Post diffusée hier que 365 chefs de l'insurgence et 2400 combattants avaient été tués ou capturés ces trois derniers mois conduisant «des chefs de certains éléments» insurgés à entamer des discussions «significatives» de réconciliation avec le gouvernement afghan.

Le haut gradé américain a expliqué sur NBC que des inquiétudes quant à un retour possible d'al-Qaïda en même temps que les talibans alimentaient le débat en Afghanistan sur une réconciliation durable.

Mais a-t-il souligné, «cette perspective de réconciliation pourrait se faire avec des éléments de base et de niveau intermédiaire dans la hiérarchie des talibans».

«Cela ne veut pas dire que le mollah Omar [l'un des fondateurs du mouvement des talibans] va bientôt déambuler dans la rue principale de Kaboul et prêter serment sur la constitution afghane», a ajouté Petraeus.

Se référant à son expérience en Irak Petraeus a noté qu'en fin de compte «on est confronté à la question de savoir si on accepte l'idée de s'asseoir un jour à la même table que des personnes ayant du sang sur les mains, et la réponse est oui», a ajouté le général.

Ce dernier est célèbre pour avoir su exploiter les divisions de l'insurrection sunnite en Irak pour renverser le cours de la guerre.

Il dispose de moins d'un an pour obtenir des résultats similaires en Afghanistan où l'insurrection des talibans a révélé les faiblesses du gouvernement de Kaboul et des forces de la coalition.

Le général Petraeus a souligné dans son interview à NBC les vulnérabilités de l'insurrection relevant qu'il ne s'agissait pas «d'une sorte d'ennemi taliban monolithique» mais plutôt d'un «syndicat de groupes d'insurgés qui n'ont pas de liens les uns avec les autres». Petraeus a, par ailleurs, assuré que la traque d'Oussama ben Laden restait une priorité. «Je ne pense pas que quelqu'un sache» où il se cache, a-t-il néanmoins indiqué.

Le chef d'al Qaïda reste «une figure iconique et je pense que le capturer ou le tuer reste une tâche très, très importante pour tous ceux qui sont engagés dans la lutte contre le terrorisme dans le monde».

Le commandant des forces américaines et alliées a enfin affirmé qu'il n'avait aucune ambition politique et ne briguerait jamais un poste dans ce domaine. «Je ne suis pas un homme politique et je ne le serai jamais. Je le dis avec une conviction absolue», a-t-il conclu.

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Avec l'Agence France-Presse

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