Des ONG réclament une enquête de l’ONU sur la détention des Ouïghours en Chine

Une quinzaine d’ONG, dont Amnesty et Human Rights Watch, ont réclamé lundi la création d’une enquête de l’ONU sur la détention « arbitraire » d’un million d’Ouïghours en Chine, minorité musulmane turcophone se disant victime de répressions.
« Ensemble, nous lançons un appel aux États membres du Conseil des droits de l’homme de l’ONU pour qu’ils mettent en place, lors de la prochaine session à la fin du mois, une mission d’établissement des faits chargée d’enquêter » sur la détention « arbitraire » des Ouïghours dans le Xinjiang, a déclaré le directeur de Human Rights Watch, Kenneth Roth.
Une telle enquête doit être décidée par la majorité des 47 États membres du Conseil, dont la Chine est actuellement membre.
« Les abus dans le Xinjiang sont si graves aujourd’hui qu’ils nécessitent une action internationale », a relevé M. Roth lors d’une conférence de presse à Genève.
S’exprimant via téléconférence, le secrétaire général d’Amnesty International, Kumi Naidoo, a qualifié la région du Xinjiang de « prison à ciel ouvert » : un lieu où « la surveillance avec haute technologie, l’endoctrinement politique, l’assimilation culturelle forcée, les arrestations arbitraires et les disparitions ont conduit les minorités ethniques à devenir des étrangers sur leur propre terre ».
Une région sous haute surveillance
Le Xinjiang, vaste région dont les Ouïghours constituent la principale ethnie, a été le cadre de violentes tensions interethniques et d’attentats meurtriers, avant d’être placée ces dernières années sous haute surveillance policière.
Jusqu’à un million de musulmans y seraient détenus dans des centres de rééducation politique, selon des accusations d’experts et d’organisations de défense des droits de l’homme. D’après Dolkun Isa, représentant du Congrès mondial ouïghour, organisation basée à Munich, il pourrait y avoir quelque « 3 millions » de personnes dans les camps.
Ces accusations sont démenties par Pékin qui parle de « centres de formation professionnelle » contre la « radicalisation » islamiste. Pékin assure que les mesures de sécurité au Xinjiang sont nécessaires pour combattre l’extrémisme, mais ne visent aucun groupe ethnique en particulier.
« La Chine s’en tire [...] parce que peu de gens savent qui sont les Ouïghours. Et parce que la Chine s’est montrée prête à utiliser son influence économique pour faire taire les critiques », a observé M. Roth.
Il a appelé les Européens et l’Organisation de la coopération islamique (OCI) à « agir de concert » au Conseil des droits de l’homme, comme ils l’ont fait dans le contexte de la crise des musulmans rohingyas en Birmanie.
Il a critiqué le « silence » du secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres sur cette question.
Des « allégations profondément inquiétantes »
En septembre, la Haute-Commissaire de l’ONU aux droits de l’Homme, Michelle Bachelet, a fait état d’« allégations profondément inquiétantes de détentions arbitraires [...] dans la région du Xinjiang » et a demandé au gouvernement chinois de donner accès à ses services au Xinjiang.
Pékin a assuré que des observateurs de l’ONU sont les bienvenus dans la région, mais à condition qu’ils « s’abstiennent de toute ingérence dans les affaires intérieures de la Chine ».