Des bruits sourds

En janvier 2010, je me suis mise à marcher à reculons, pour ne pas me perdre. J’ai planté ma tristesse sur des terrains vagues, dans la persistante odeur de cadavre, assaillie par des voix qui donnaient tort au silence, rappelaient que tout n’était pas tombé. Les jours ont passé. Les années. J’ai changé d’époque, changé de peur, retracé les chemins enfouis, redessiné les visages.
Le temps se limite encore souvent à ces bruits sourds, l’impression que les choses sont en mouvement, que la terre se rebelle. J’écris. Il y a trop d’histoires à commencer, à terminer, trop peu de temps pour réinventer la vie d’avant, le passé perdu.
Cinq années et le reste de ma vie pour édifier ces murs de prénoms, pour assimiler la pluie aux éternels sanglots de défaite de quelque Dieu sourd et impuissant.
Les chemins de la mémoire passeront par Impasse Dignité, ici on est sûr que le temps sera toujours beau, qu’une vie est courte, qu’une envie peut avoir un commencement, qu’on peut infiniment rêver la vie.