Greenpeace dénonce le «don intéressé» de semences hybrides à Haïti

L’organisme environnemental Greenpeace a dénoncé aujourd’hui le «don intéressé» de semences hybrides de l’entreprise américaine Monsanto aux agriculteurs haïtiens.

Ces semences, qui nécessitent habituellement l’épandage de pesticides — également produits par Monsanto —, entraîneraient une dépendance accrue des paysans envers les multinationales, leurs semences et leurs produits chimiques, selon Éric Darier, de Greenpeace.

«Bien sûr, ça peut être un don désintéressé, mais Monsanto n’est pas ce genre de compagnie, a déclaré M. Darier. Je pense qu’on peut remplacer les (dons) de Monsanto par des semences que les agriculteurs locaux veulent et auxquelles ils font confiance.»

Monsanto n’offrirait actuellement aux agriculteurs haïtiens que des semences de maïs et de légumes hybrides, selon M. Darier. Ces dons ouvriraient toutefois la porte à une plus grande variété de semences hybrides, qui doivent être achetées chaque année.

Le tremblement de terre meurtrier qui a secoué Haïti le 12 janvier dernier a également contribué à fragiliser le pays, qui est plus dépendant que jamais des dons internationaux, selon Chavannes Jean-Baptiste, du Mouvement Peyizan Papay.

«Monsanto veut profiter du tremblement de terre pour prendre pied à Haïti. C’est inadmissible pour nous, a dit M. Jean-Baptiste. Si les pays donateurs se mettent à envoyer des semences hybrides, c’est la fin de l’agriculture en Haïti.»

Sébastien Rioux, coordinateur de l’organisme «Haïti, une semence, un pays», a d’ailleurs exhibé une liste des types de semences demandées aux différents pays donateurs qu’il affirme provenir du ministère haïtien de l’Agriculture, des Ressources naturelles et du Développement rural. Le nom de la compagnie Monsanto est le seul à y apparaître à plusieurs reprises.

«Je dénonce cette liste, et je me demande s’il existe des liens entre Monsanto et le gouvernement haïtien», a dit M. Rioux, qui a envoyé plus de 15 000 $ en semences biologiques pour assurer la souveraineté alimentaire d’Haïti.

«Je n’irai pas jusque-là, c’est à vous d’en tirer des conclusions, mais je crois qu’il y a une raison pour laquelle Monsanto est là-bas. Le problème, c’est que Monsanto va s’approprier certaines semences dans le pays, et que le paysan devra lui payer une redevance s’il souhaite les cultiver sur ses terres. On les rend donc dépendants du reste du monde, et c’est ça qui me choque», a ajouté M. Rioux.

Ces préoccupations ont été soulevées dans le cadre d’une manifestation qui s’est déroulée devant le consulat général d’Haïti à Montréal. M. Darier, ainsi que des représentants de syndicats agricoles et de groupes écologistes du Québec et du Canada, ont également remis symboliquement une éprouvette de semences biologiques au consul haïtien Pierre-Richard Casimir, ainsi qu’une lettre dénonçant la situation.

La rencontre a été qualifiée de «surprenante» et de «productive» par M. Darier, même si M. Casimir n’aurait offert aucune promesse aux écologistes.

Plusieurs manifestations ont été organisées aujourd’hui à Haïti pour dénoncer les dons de Monsanto, qui a offert jusqu’ici cette année 475 tonnes de semences au pays le plus pauvre d’Amérique.

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