L'opposition à Uribe envahit la rue - Colombie : manifestations contre les paramilitaires et les crimes de l'État

Des dizaines de milliers de personnes se sont rassemblées hier à Bogotá et dans une vingtaine de villes colombiennes pour manifester en faveur des victimes des groupes paramilitaires et des «crimes de l'État» colombien.
Ces manifestations, également prévues dans une centaine de villes à travers le monde, dont Montréal, témoignaient de la solidarité des Colombiens avec les «quatre millions de personnes déplacées, les 15 000 disparus et les 3000 personnes enterrées dans des fosses communes par les paramilitaires», ont expliqué les organisateurs, le Mouvement des victimes de crimes d'État.Les manifestants voulaient aussi exprimer «la solidarité des Colombiens avec 1700 Indiens, 2550 syndicalistes et 5000 membres de l'Union patriotique, assassinés au cours des dernières décennies». «C'est une marche de solidarité, nous défilons pour exprimer notre soutien à ceux qui ont été victimes de crimes», a déclaré Ivan Cepeda, fils d'un dirigeant communiste assassiné en 1994 et organisateur de la manifestation.
«Plus de paramilitaires, plus de massacres et plus d'impunité», pouvait-on lire sur les pancartes des manifestants, souvent vêtus de noir.
Les journaux, radios et télévisions avaient très brièvement annoncé ces manifestations, contrairement à celles du 4 février contre la guérilla marxiste des Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC), objet d'un battage médiatique sans précédent.
Des centaines de milliers de personnes avaient manifesté ce jour-là en Colombie et à l'étranger pour dénoncer la violence et les prises d'otages auxquelles se livrent les rebelles marxistes. Cette mobilisation avait obtenu le soutien actif des autorités colombiennes et avait été coordonnée à l'étranger par les ambassades.
Le gouvernement colombien avait en revanche indiqué le 15 février qu'il ne «s'associait» pas au mouvement d'hier. Le principal conseiller présidentiel, José Obdulio Gaviria, membre de la famille du célèbre trafiquant de drogue Pablo Escobar, avait annoncé que le gouvernement ne participerait pas à cette marche «convoquée par les FARC».
Des centaines de familles de victimes des groupes paramilitaires ou des exactions de l'armée colombienne, qui a souvent collaboré avec ces milices d'extrême droite, brandissaient les photos de leurs parents tués ou portés disparus.
À Bogotá, où 1500 policiers supplémentaires ont été mobilisés, les défilés ont convergé vers la place Bolívar, où des centaines de silhouettes de victimes ont été dessinées au sol à la craie. D'imposantes pancartes de politiciens et syndicalistes assassinés étaient placardées sur les murs.
Échec d'une libération
Mais le président équatorien a allumé un nouveau feu contre le président colombien Álvaro Uribe en l'accusant d'avoir sciemment torpillé la libération de plusieurs otages des FARC lors du raid qui a tué le numéro 2 des rebelles.
«Il savait qu'en mars, 12 otages allaient être libérés, parmi eux Ingrid Betancourt», a-t-il accusé. «Il le savait et il a utilisé ces contacts [...] pour monter ce traquenard, pour faire croire au monde qu'il s'agissait de contacts politiques et de soutien aux FARC et pour répandre un écran de fumée sur son action injustifiable.»
L'ambassade de France a annoncé mardi à Quito qu'elle était au courant des contacts des autorités équatoriennes avec les FARC pour libérer l'ancienne candidate à la présidentielle en Colombie, qui détient aussi la nationalité française.
Cette révélation met à mal la position des autorités colombiennes, qui accusent l'Équateur et le Venezuela de collaborer avec les FARC pour déstabiliser la région.
Le Groupe de Rio se réunit aujourd'hui en République dominicaine, où le dossier colombien sera longuement discuté.