Sécheresse dans la Corne de l'Afrique - 750 000 Somaliens sont en danger de mort, avertit l'ONU

Un peu d’eau pour des réfugiés, hier, près de la capitale somalienne, Mogadiscio
Photo: Agence Reuters Feisal Omar Un peu d’eau pour des réfugiés, hier, près de la capitale somalienne, Mogadiscio

La famine s'est encore étendue en Somalie, et la situation risque de se détériorer davantage d'ici à la fin de l'année, a averti hier l'ONU, qui enregistre une sixième région frappée et 750 000 personnes désormais menacées de mort dans le pays le plus touché par la sécheresse dans la Corne de l'Afrique.

Les unes après les autres, les régions du sud somalien sombrent dans la famine. Hier, les Nations unies ont officiellement décrété en état de famine une nouvelle d'entre elles, la province de Bay. Comme elles l'ont déjà fait avec cinq autres zones depuis un mois et demi: Bas Shabelle et le sud de Bakol, ainsi que les 400 000 déplacés des camps d'Afgoye, au nord de Mogadiscio, et enfin les districts de Balaad et d'Adale dans le Moyen Shabelle.

Les experts ne sont guère optimistes quant à l'évolution de la crise, dont l'épicentre est localisé dans le sud et le centre du pays. Les provinces de Juba, Gedo et Hiiran pourraient d'ailleurs connaître le même sort d'ici à la fin de l'année. «Au total, quatre millions de personnes sont en situation de crise en Somalie, dont 750 000 qui risquent la mort dans les quatre prochains mois en l'absence de réponse adéquate», a alerté hier l'Unité d'analyse pour la sécurité alimentaire de l'ONU (FSNAU).

La tendance à l'aggravation se confirme car, en juillet, les Nations unies craignaient déjà pour la vie de 450 000 personnes, sur une population estimée à moins de huit millions d'habitants. Des dizaines de milliers de personnes, dont la moitié des enfants, seraient déjà mortes des suites de cette sécheresse.

La pire de toutes

À en croire Grainne Moloney, une technicienne des Nations unies, la situation dans la province de Bay serait la pire de toutes: «Le taux de malnutrition est de 58 %, c'est un record de malnutrition aiguë», a indiqué hier l'experte basée au Kenya voisin.

C'est en tout cas presque le double du chiffre retenu par l'ONU pour déclarer une région en état de famine, qui, pour ce faire, doit également déterminer si 20 % des foyers sont confrontés à une grave pénurie alimentaire, et si la mortalité quotidienne dépasse les 2 pour 10 000 personnes.

Bay avait déjà été au coeur de la famine au début des années 1990, sa capitale Baïdoa était alors surnommée la «cité de la mort». Située dans le sud, la région est contrôlée par la rébellion jihadiste des shebab en lutte armée contre le faible Gouvernement de transition somalien (TFG). Les vingt ans de guerre civile depuis la chute du président Siad Barré en 1991 compliquent le travail des agences humanitaires.

Hier, Médecins sans frontières n'a pas caché ses difficultés et les limites de son intervention. «Malgré nos constantes négociations avec toutes les parties du conflit pour améliorer notre accès, il nous faudra peut-être nous résoudre à l'idée que nous ne serons jamais capables d'atteindre les communautés les plus dans le besoin ou qu'il faudra compromettre une partie de notre indépendance pour le faire», déplorait hier le président international de MSF, Unni Karunakara.

Cette difficulté à acheminer l'aide et le chaos persistant ternissent les appels aux dons lancés par la communauté humanitaire. Hier, l'ONU a dit n'avoir reçu que 550 millions de dollars sur le 1,06 milliard demandé aux pays donateurs pour la Somalie. Il en faudra plus pour faire la soudure avec la prochaine récolte de janvier déjà menacée par la sécheresse.

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