150 morts en trois jours - Des Irakiens forment des milices de quartier

Source: Ceerwan Aziz REUTERS
Une barricade a été dressée par des résidants d’un quartier de Bagdad.
Photo: Source: Ceerwan Aziz REUTERS Une barricade a été dressée par des résidants d’un quartier de Bagdad.

L'Irak comptait ses morts hier après une série d'attentats suicide qui ont secoué le pays depuis trois jours, faisant près de 150 morts. Des citoyens ont décidé de s'organiser pour se protéger.

Décidés à se défendre contre des attentats suicide incessants par rapport auxquels les autorités restent impuissantes, des Irakiens se barricadent chez eux et forment des milices de quartier, ont rapporté hier des habitants de Bagdad.

Cette évolution traduit une confiance de plus en plus ténue dans les forces de sécurité, en butte à une insurrection engagée depuis deux ans et dont la dernière opération spectaculaire a fait 98 morts samedi à Moussayyib, au sud de la capitale.

Un parlementaire irakien en vue s'est prononcé dimanche pour la création de milices populaires en guise de nouveau front contre les activistes, et il a reproché au gouvernement de ne pas empêcher plus efficacement les attentats à la bombe. «Les plans des ministères de l'Intérieur et de la Défense pour la sécurité en Irak ont échoué», a déclaré Khoudair al Khouzai au Parlement au cours d'une séance houleuse qui a suivi le carnage de Moussayyib. «Nous devons rétablir des milices populaires», a-t-il ajouté sans plus de précisions.

Si sa proposition a reçu des appuis, certains craignent que des milices constituées selon des critères confessionnels n'enfoncent encore plus le pays dans la guerre civile, les chiites et les sunnites étant déjà engagés dans l'engrenage des attentats. En dépit de ce risque, des milices locales se sont déjà formées dans plusieurs quartiers de Bagdad, et deux mouvements politiques chiites disposent d'une armée privée.

À Sadia, dans le sud de la capitale, des habitants ont mis en place un système de surveillance locale dans le cadre duquel des hommes armés de pistolets et de kalachnikov arpentent les rues la nuit pour repousser d'éventuels assaillants. Ils sont porteurs d'un document signé par l'armée irakienne qui les autorise à effectuer ces patrouilles. Dans d'autres quartiers, des habitants ont barré des rues au moyen d'arbres tronçonnés ou de grandes jarres de ciment, dans l'espoir de faire échec à des attentats au véhicule piégé.

«Mieux vaut avoir nos propres milices, parce que nous sommes en mesure de repérer tous les étrangers qui arrivent dans notre quartier alors que la police ne le peut pas», confie Sattar Hachim dans le quartier de la Nouvelle-Bagdad, où l'explosion d'une bombe a tué plus de 20 enfants la semaine dernière.

Selon Hachim, des hommes du quartier surveillant les lieux pendant les obsèques de ces victimes ont arrêté un Libyen portant une ceinture d'explosifs qui s'apprêtait à frapper en plein milieu des cérémonies funéraires. Des voisins se disent favorables aux mesures de sécurité locales.

«Quand ils ont barré cette rue, j'ai eu moins de clients dans ma boutique et les ventes ont baissé, mais ça m'est égal si nous sommes tous en sécurité», dit Cheikh Mohammed, propriétaire d'une échoppe de médicaments à base de plantes dans une rue encombrée de grilles, de canalisations et de troncs d'arbre.

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