Dénonciations de corruption au Brésil - L'ex-trésorier du PT reconnaît l'existence d'une caisse noire

Rio de Janeiro — Les dénonciations de corruption qui secouent le Brésil depuis deux mois ont abouti à révéler une opération de financement illégal du Parti des travailleurs (PT) et de partis alliés du gouvernement Lula, reconnue ouvertement pour la première fois cette fin de semaine par l'ex-trésorier du PT Delubio Soares.

Soares et la nouvelle direction du PT continuent toutefois de nier que ce financement, effectué par l'intermédiaire du publicitaire Marcos Valerio, ait servi à payer des députés en échange de leurs votes en faveur du gouvernement, accusation à l'origine de la crise politique. Dans une interview à TV Globo, M. Soares a révélé qu'il avait emprunté 39 millions de réals (14 millions d'euros) en deux ans à Valerio pour solder les dépenses électorales du PT lors des élections générales de 2002 et financer la campagne des élections municipales de 2004.

«Tout s'est passé entre moi et lui, j'ai signé un document particulier avec lui», a souligné M. Soares, qui a assuré que les autres responsables du parti ou du gouvernement n'étaient pas impliqués dans l'opération. «J'assume en tant qu'ex-trésorier du PT devant la nation: nous avons eu pendant la période 2003 et 2004 de l'argent non comptabilisé.» Il a affirmé qu'au Brésil, ce genre de financement existait «dans tous les partis».

Ces déclarations vont dans le même sens que celles faites la veille par Marcos Valerio à la télévision. Lui aussi a changé le contenu de ses déclarations précédentes, notamment celles faites devant la Commission parlementaire d'enquête (CPI), et reconnu que ses entreprises publicitaires avaient servi de façade au financement du PT, à la demande de Delubio Soares. Les emprunts bancaires «ont été faits au nom de mes entreprises et reversés au Parti des travailleurs», a reconnu Valerio.

Marcos Valerio et Delubio Soares avaient été dénoncés le 6 juin comme étant les principaux opérateurs d'un système d'achat de votes de députés, par Roberto Jefferson, député du Parti travailliste brésilien (PTB), allié du gouvernement.

L'affaire des «mensualités» payées à des députés a notamment entraîné le 16 juin la démission du ministre José Dirceu, responsable du cabinet présidentiel, puis celle du président du PT José Genoino, le 9 juillet.

Soares, qui a démissionné le 5 juillet de son poste de trésorier du PT, a assuré que ni Dirceu ni Genoino n'avaient participé à la mise en place de la caisse noire ou à la distribution de l'argent.

Il a également nié que les sommes indiquées aient servi à l'achat de votes de députés. «Cette histoire de mensualités n'est pas véridique, c'est un mensonge. Il n'y a pas eu d'achat de votes, ni d'achat de députés pour voter en faveur du gouvernement.»

Une nouvelle révélation, faite par le journal Estado de Sao Paulo, est toutefois venue hier alimenter cette accusation.

La Commission parlementaire d'enquête (CPI) sur le scandale des Postes a reçu une liste de 22 députés bénéficiaires des «mensualités», parmi lesquels le président de la Chambre des députés lui-même.

Cette liste a été fournie par un ex-permanent du Parti populaire (PP, droite), auquel appartient le président de la Chambre, Severino Cavalcanti. Elle comprend les noms de 18 députés du PP, deux du Parti du mouvement démocratique brésilien (PMDB, centre), un du Parti travailliste brésilien (PTB, centre-droit) et un du Parti libéral (PL, droite), partis alliés du gouvernement Lula.

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