Liberté d’expression : Elon Musk suspend des journalistes sur Twitter et provoque un tollé

« Les comptes impliqués dans du doxing reçoivent une suspension temporaire de sept jours », a écrit sur Twitter Elon Musk, en indiquant que ces règles s’appliquaient « “aux journalistes” comme à n’importe qui d’autre ».
Olivier Douliery Agence France-Presse « Les comptes impliqués dans du doxing reçoivent une suspension temporaire de sept jours », a écrit sur Twitter Elon Musk, en indiquant que ces règles s’appliquaient « “aux journalistes” comme à n’importe qui d’autre ».

Elon Musk, nouvellement propriétaire de Twitter, a provoqué vendredi un tollé après avoir suspendu les comptes de plusieurs journalistes américains et se voit menacé de sanctions par l’Union européenne, tandis que l’ONU a dénoncé « un dangereux précédent ».

Les Nations unies ont vigoureusement dénoncé la suspension de ces comptes Twitter par Elon Musk, qui se proclame pourtant défenseur de la liberté d’expression.

« La décision crée un dangereux précédent à un moment où les journalistes partout dans le monde sont confrontés à la censure, des menaces physiques, et même pire », a affirmé Stéphane Dujarric, le porte-parole du secrétaire général de l’ONU, António Guterres.

La vice-présidente de la Commission européenne, Vera Jourova, a rappelé qu’il y avait « des lignes rouges » à ne pas franchir, menaçant Elon Musk « de sanctions, bientôt » dans une publication Twitter.

Une douzaine de journalistes américains ont été suspendus du réseau social. Parmi eux, des employés de médias comme CNN (Donie O’Sullivan), le New York Times (Ryan Mac), le Washington Post (Drew Harwell) et des journalistes indépendants.

Certains avaient gazouillé à propos de la décision prise mercredi par Twitter de suspendre le compte qui rapportait automatiquement les trajets de l’avion privé d’Elon Musk.

Ce dernier les a accusés de mettre en danger sa sécurité ainsi que celle de sa famille.

 

Il avait affirmé mercredi dans une publication sur son site qu’un véhicule avec un de ses enfants à bord avait été suivi à Los Angeles par « un harceleur fou », semblant créer un lien de causalité avec le positionnement en temps réel de son avion.

L’organisation Reporters sans frontières a appelé au rétablissement des comptes des journalistes concernés, estimant que « l’arbitraire des grandes plateformes » représentait un « danger majeur pour la démocratie ».

« Suspension temporaire »

Twitter n’a pas précisé pourquoi ces comptes avaient été suspendus. Le propriétaire du réseau social, source de nombreuses polémiques depuis qu’il l’a racheté, en octobre, a toutefois donné quelques indications.

« Tout le monde sera traité de la même façon », a-t-il affirmé dans une conversation audio organisée en direct vendredi sur Twitter, indiquant qu’il n’y aurait pas de passe-droit pour les journalistes. Relancé sur le sujet, M. Musk a quitté la discussion. Il a ensuite désactivé le service de conversation audio Twitter Spaces, arguant un « problème technique ».

Dans un gazouillis publié dans la nuit de jeudi à vendredi, M. Musk avait annoncé une suspension temporaire de sept jours pour « les comptes impliqués dans du doxing ».

Le terme « doxing » signifie rendre publiques sur Internet des informations personnelles relatives à un individu, sans son accord.

« Ils ont publié ma position géographique exacte en temps réel, c’est-à-dire littéralement les coordonnées permettant un assassinat, en violation directe (et évidente) des conditions d’utilisation de Twitter », a également assuré M. Musk. Le compte Twitter de Mastodon, concurrent du réseau social, a également été suspendu.

« Harceleur »

Après l’incident du véhicule suivi, dans lequel se trouvait son fils, M. Musk a annoncé dans cette publication qu’il allait poursuivre en justice la personne à l’origine du compte @ElonJet, désormais suspendu.

Créé par un étudiant et suivi par environ 500 000 personnes, @ElonJet utilisait les données publiques pour indiquer, de façon automatique, quand et où l’appareil du patron de SpaceX et Tesla décollait et atterrissait.

Twitter avait communiqué par la suite pour annoncer que son règlement interdisait désormais la plupart des publications qui indiquaient la position de quelqu’un en temps réel.

À son arrivée à la tête de Twitter, Elon Musk avait pourtant promis de ne pas toucher au compte @ElonJet.

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