Les États-Unis promettent de rester engagés, les pays du Sud s’impatientent

Des militants manifestent pour le climat à Zagreb, pendant qu’en Égypte se tient la conférence de l’ONU sur le climat.
Photo: Denis Lovrovic Agence France-Presse Des militants manifestent pour le climat à Zagreb, pendant qu’en Égypte se tient la conférence de l’ONU sur le climat.

Le président américain, Joe Biden, restera « déterminé » dans la lutte contre le changement climatique quel que soit le résultat des élections aux États-Unis, a promis son émissaire mardi à la COP27, où les pays du Sud réclament des financements qui pourraient devenir astronomiques.

« La crise climatique ne menace pas seulement nos infrastructures, nos économies ou notre sécurité : elle menace chaque aspect de notre vie au quotidien », a déclaré l’émissaire américain pour le climat John Kerry, au troisième jour de la grande conférence de l’ONU sur le climat qui se tient à Charm el-Cheikh, en Égypte.

« Le président Biden est plus déterminé que jamais à continuer ce que nous faisons », quel que soit le résultat des élections, et reconnaît la « responsabilité particulière » de son pays à l’égard des nations en développement, a-t-il assuré.

Le président américain n’est pas présent en Égypte en même temps que les autres dirigeants, puisqu’il attendait mardi le résultat d’élections de mi-mandat cruciales pour son avenir politique. Il ira toutefois à Charm el-Cheikh vendredi.

Les dirigeants continuaient de défiler mardi à la COP27, qui a inscrit officiellement à son ordre du jour la question des pertes et dommages subis par les pays du Sud.

2000 milliards par an

« Ce n’est qu’une étape », a lancé mardi à la tribune le premier ministre d’Antigua-et-Barbuda, Gaston Browne, au nom de l’Alliance des petits États insulaires, qui sont menacés par la montée des eaux.

« Nous devons sans équivoque établir un fonds pour les pertes et dommages à cette COP », et il ne sera « qu’un modeste gage alors que nos membres perdent jusqu’à 2 % de leur PIB en un jour à cause d’un seul événement climatique », a-t-il jugé.

« Il faut respecter le principe du pollueur-payeur, dans la solidarité », a dit à l’Agence France-Presse le président du Sénégal et de l’Union africaine, Macky Sall.

Photo: Peter Dejong Associated Press Le premier ministre d’Antigua-et-Barbuda, Gaston Browne, s’est adressé aux délégués au nom de l’Alliance des petits États insulaires.

Ces discussions se tiennent dans un contexte toujours plus pressant de catastrophes. Cette année, on a vu des inondations historiques au Pakistan, une sécheresse qui menace de famine la Corne de l’Afrique et des records de chaleur en Europe cet été.

Le secrétaire général de l’ONU avait exhorté lundi les dirigeants à renforcer la lutte avant qu’il ne soit trop tard. « L’humanité a un choix : coopérer ou périr. C’est soit un pacte de solidarité climatique, soit un pacte de suicide collectif », a clamé António Guterres.

Une taxe carbone mondiale ?

Cette solidarité doit se traduire en engagements financiers, notamment à destination des pays pauvres, et la question de l’argent est la plus âprement discutée à l’occasion de la COP27.

Les pays du Sud auront besoin de plus de 2000 milliards de dollars par an d’ici 2030 pour financer leur action climatique, dont près de la moitié venant d’investisseurs extérieurs, selon un rapport commandé par la présidence de la COP publié mardi.

« Les pays riches devraient reconnaître que c’est dans leur propre intérêt vital, ainsi qu’une question de justice, compte tenu des graves effets causés par leurs émissions élevées hier et aujourd’hui, d’investir dans l’action climatique » dans ces pays, a souligné Nicholas Stern, économiste de renom qui a cosigné le rapport.

Mais si les acteurs privés sont appelés à la rescousse, ils doivent respecter des règles, ont aussi fait valoir des experts de l’ONU, qui font aussi une mise en garde contre les fausses promesses de « neutralité carbone » : pas d’investissements nouveaux dans les énergies fossiles, pas de « compensation » bon marché des émissions, pas de déforestation.

Face aux immenses besoins, des voix de plus en plus nombreuses appellent à une réforme du système financier international, conçu à la fin de la Seconde Guerre mondiale, pour mieux aider des pays comme le Pakistan, où des inondations ont submergé un tiers du territoire et touché quelque 33 millions de personnes, causant plus de 30 milliards de dollars de dégâts et de pertes économiques.

Le pays doit se préparer désormais à passer l’hiver, avec des millions de personnes à reloger. « Comment peut-on attendre de nous qu’on entreprenne cette tâche gigantesque seuls ? » a demandé le premier ministre pakistanais, Shehbaz Sharif, à la tribune.

Le président de l’Afrique du Sud, Cyril Ramaphosa, a aussi regretté une aide multilatérale « hors de portée de la majorité de la population mondiale en raison de politiques de prêts peu enclines à prendre des risques, assorties de coûts et de conditions onéreux ».

Pour l’immédiat, Gaston Browne a réclamé que les géants du pétrole et du gaz, qui réalisent des bénéfices stratosphériques cette année, passent à la caisse. « Il est temps que ces entreprises paient une taxe carbone mondiale sur ces profits pour couvrir les pertes et préjudices », a-t-il exigé.

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