Une dernière nuit au palais de Buckingham

Sous les hourras et les applaudissements de fidèles sujets, la dépouille de la reine Élisabeth II est arrivée mardi soir à Londres, précisément au palais de Buckingham, afin d’y passer une dernière nuit, avant cinq jours d’hommage du public à Westminster.
Elle y a été accueillie par son fils Charles III et la reine consort, Camilla, revenus d’une brève visite officielle en Irlande du Nord, et d’autres membres de la famille royale. Son retour dans la capitale prépare ses funérailles, qui auront lieu lundi à l’abbaye de Westminster.
À l’extérieur du palais, une foule immense a salué l’arrivée de celle qui a régné 70 ans sur le pays, par des hourras et des applaudissements nourris, éclairant la scène avec leur téléphone portable malgré la météo capricieuse.
Le cercueil de la reine, recouvert de l’étendard royal jaune, rouge et bleu du Royaume-Uni et d’une couronne de fleurs blanches, a été déchargé, par les célèbres grenadiers, du corbillard qui l’avait transporté depuis l’aéroport de la Royal Air Force, où il avait atterri une heure plus tôt.
Sur sa route, des centaines d’automobilistes sont sortis de leur voiture pour lui faire une haie d’honneur, n’hésitant pas à franchir le terre-plein central après avoir arrêté leur véhicule sur la partie en sens contraire de l’autoroute.
« Je veux juste voir le cercueil », a expliqué à l’Agence France-Presse (AFP) Joseph Afrane, un Britannique de 59 ans qui campait depuis dimanche devant Buckingham.
La dépouille d’Élisabeth II passera mardi sa dernière nuit au palais, où la reine a si souvent résidé, dans la Bow Room, une pièce circulaire dont les colonnes de marbre encadrent chacune des fenêtres. Le personnel du palais pourra lui présenter ses adieux en privé.
Mercredi, le cercueil de la souveraine décédée jeudi à 96 ans quittera sa demeure officielle dans la capitale britannique sur un affût de canon, traversant le centre de Londres pour rejoindre lors d’une procession grandiose le palais de Westminster, où il sera exposé pendant cinq jours à Westminster Hall.
Un dernier au revoir
Les funérailles nationales de la reine auront lieu lundi en présence de quelque 500 dignitaires étrangers et de nombreuses têtes couronnées, mais pas des dirigeants de la Russie, de la Biélorussie ou du Myanmar.
L’événement, défi sécuritaire d’une ampleur inégalée, promet d’être grandiose, pour les derniers adieux d’un peuple qui, en majorité, n’a pas connu d’autre souveraine qu’Élisabeth II depuis sa naissance.
Des milliers de personnes sont attendues pour la procession dans le centre de Londres, qui sera saluée par la cloche de Big Ben et des coups de canon à Hyde Park. La presse évoque jusqu’à 750 000 personnes sur plus de 10 kilomètres. À Édimbourg, 33 000 personnes se sont déjà succédé pour lui dire adieu à la cathédrale Saint-Gilles.
« On s’attend à une file d’attente monstre dès mercredi matin », a confié à l’AFP Rumesh, un agent de sécurité positionné près du palais de Westminster. « C’est le calme avant la tempête ! » « Je n’ai jamais rien vu de tel […] on sent que ça arrive, et que ça va être énorme. » Mardi matin, une poignée de fidèles, entourés de dizaines de journalistes, bravaient déjà la pluie londonienne pour patienter de l’autre côté de la Tamise, bien avant l’ouverture officielle de Westminster Hall à la foule, mercredi à 17 h, heure locale.
Figure populaire, roc de stabilité dans les tempêtes politiques, sociales ou sanitaires pendant la COVID-19, la reine était une image rassurante pour des millions de Britanniques. Un lourd héritage à porter pour son fils Charles III.
Tensions en Irlande du Nord, velléités indépendantistes en Écosse, inflation galopante : le nouveau roi de 73 ans, plus âgé que tous les souverains britanniques lors de leur accession au trône, s’installe dans ses fonctions dans un moment critique. Le pays, en proie à une grave crise sociale et politique, a une nouvelle première ministre depuis quelques jours.
Mardi, il a déjà passé sans accroc une étape délicate de son accession au trône, lors de sa première visite en tant que souverain en Irlande du Nord, région en proie depuis le Brexit aux tensions communautaires héritées du sanglant passé des « Troubles ».
« Avec un exemple brillant devant moi, et avec l’aide de Dieu, je prends mes nouvelles fonctions, résolu à rechercher le bien-être de tous les habitants d’Irlande du Nord », a déclaré le monarque au Parlement local, à l’arrêt depuis la victoire aux dernières élections des républicains du Sinn Féin, qui ne reconnaissent pas l’autorité de la monarchie.