L’UE prête main-forte à l’Allemagne

Les ministres de l’Énergie de l’Union européenne (UE), réunis à Bruxelles, se sont accordés mardi pour réduire la consommation de gaz de façon coordonnée et ainsi voler au secours de l’Allemagne, après l’annonce d’une nouvelle baisse radicale des livraisons russes.
« L’Union européenne a confirmé aujourd’hui [mardi] qu’elle était unie et solidaire. Nous avons fait un immense pas en avant pour garantir la fourniture de gaz cet hiver », a déclaré le ministre tchèque, Jozef Síkela, dont le pays assure la présidence tournante du Conseil de l’UE.
« Nous allons partager le fardeau. Les négociations n’ont pas été faciles, mais finalement, tout le monde a compris que ce sacrifice était nécessaire », a-t-il ajouté lors d’une conférence de presse.
La Hongrie a cependant dénoncé mardi un accord « injustifiable, inutile, inapplicable et nuisible ». Parmi les Vingt-Sept, seul Budapest s’est opposé au texte, qui est donc adopté à la majorité qualifiée.
La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a salué de son côté l’adoption du plan qu’elle avait présenté la semaine dernière. Même s’il a été profondément remanié.
Il prévoit toujours que chaque pays fasse « tout son possible » pour réduire, entre août 2022 et mars 2023, sa consommation de gaz d’au moins 15 % par rapport à la moyenne des cinq dernières années sur la même période. La Russie représentait jusqu’à l’an dernier quelque 40 % des importations gazières de l’UE.
En cas de « risque de grave pénurie », un mécanisme d’alerte rendra « contraignante » pour les Vingt-Sept la réduction de 15 %, mais cet objectif sera adapté aux réalités de chaque pays, notamment aux capacités d’exporter les quantités de gaz économisées aux pays dans le besoin, grâce à une série de dérogations.
« Cet engagement collectif est très important et nous aidera à reconstituer les stocks avant l’hiver », a estimé Mme von der Leyen.
Le géant russe Gazprom avait annoncé lundi qu’il allait diviser par deux dès mercredi ses livraisons quotidiennes envoyées en Europe par le gazoduc Nord Stream, lequel tombera ainsi à seulement 20 % de sa capacité, en invoquant une opération de maintenance sur une turbine.
Un porte-parole du Kremlin a estimé mardi que la réduction de débit s’expliquait par les sanctions occidentales prises contre la Russie après l’invasion de l’Ukraine. « S’il n’y avait pas eu ces restrictions, tout aurait été accompli […] dans les délais habituels, sans mener à la situation que nous voyons aujourd’hui. »
Mais les Européens réfutent le motif technique et accusent Moscou d’utiliser le gaz comme une arme économique.
« En utilisant Gazprom, Moscou fait tout afin que cet hiver soit le plus dur pour les pays européens. Il faut répondre à la terreur, répondre par des sanctions », a déclaré dans son message du soir le président ukrainien, Volodymyr Zelensky.
Sauver l’industrie européenne
Au coeur du dispositif européen, la réduction obligatoire de 15 % de la consommation avait suscité des critiques.
Elle vise à mutualiser l’effort en cas d’urgence pour en particulier aider l’Allemagne, qui, très dépendante du gaz russe, achetait toujours début juin 35 % de son gaz en Russie — contre 55 % avant la guerre.
Or, un choc majeur sur la première économie européenne se répercuterait immanquablement sur l’ensemble de l’UE. La réduction de 15 % de la consommation de gaz impose de fait des contraintes à des pays comme la France et l’Espagne, pourtant à l’abri d’une rupture des approvisionnements russes grâce à leurs politiques énergétiques.
Mais l’effort restera plus important pour l’Allemagne. Elle devra « faire mieux » que 15 %, a reconnu son ministre de l’Économie, Robert Habeck, tout en se félicitant de la solidarité européenne. Berlin « a commis une erreur stratégique dans le passé » en cultivant cette dépendance à l’égard de Moscou, a-t-il admis.
Le plan avait fait dans les derniers jours l’objet de vives critiques de la part de plusieurs États. Parmi les plus virulents, ceux d’Europe du Sud, dont l’Espagne, où le souvenir des douloureux plans de rigueur imposés par Berlin après la crise financière de 2008 est encore vif.
La ministre espagnole de la Transition écologique, Teresa Ribera, avait jugé le projet « injuste » et « inefficace ».
Les diplomates des 27 ont tenu compte des griefs. Ce sera finalement le Conseil de l’UE, représentant les États membres, et non la Commission, comme celle-ci le demandait, qui déclenchera le mécanisme contraignant.