Accord de fin des hostilités entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan

Des gens installaient un drapeau arménien au siège du gouvernement à Erevan, lundi, protestant contre l’entente qui met fin au conflit dans le Haut-Karabakh.
Photo: Dmitri Lovetsky Associated Press Des gens installaient un drapeau arménien au siège du gouvernement à Erevan, lundi, protestant contre l’entente qui met fin au conflit dans le Haut-Karabakh.

L’Azerbaïdjan et l’Arménie ont signé sous l’égide de la Russie un accord de fin des hostilités dans le conflit du Haut-Karabakh qui consacre les victoires militaires azerbaïdjanaises après six semaines de combats meurtriers.

« Le 9 novembre, le président de l’Azerbaïdjan [Ilham] Aliev, le premier ministre de l’Arménie [Nikol] Pachinian et le président de la fédération de Russie ont signé une déclaration annonçant un cessez-le-feu total et la fin de toutes les actions militaires dans la zone du conflit du Haut-Karabakh », a annoncé le président russe, Vladimir Poutine, selon une déclaration diffusée dans la nuit de lundi à mardi aux médias.

Selon lui, les belligérants gardent au terme de cet accord, qui est entré en vigueur à 21 h GMT lundi, « les positions qu’ils occupent ».

Le président azerbaïdjanais, Ilham Aliev, s’est félicité d’une « capitulation » de l’Arménie.

« J’avais dit qu’on chasserait [les Arméniens] de nos terres comme des chiens, et nous l’avons fait », a-t-il dit, traitant aussi le premier ministre arménien de « lâche » pour ne pas avoir signé la déclaration commune devant des caméras.

Dans un communiqué publié sur sa page Facebook, M. Pachinian avait indiqué un peu plus tôt avoir « signé une déclaration avec les présidents de Russie et d’Azerbaïdjan sur la fin de la guerre au Karabakh ».

Il a qualifié cette initiative « d’incroyablement douloureuse pour moi et pour notre peuple ».

Peu après l’annonce, des milliers de manifestants en colère se sont rassemblés aux abords du siège du gouvernement arménien, des centaines d’entre eux pénétrant dans les locaux, brisant des vitres et saccageant des bureaux, notamment une salle de Conseil des ministres, selon un journaliste de l’AFP présent sur place.

Avancées azerbaïdjanaises

 

« Nikol est un traître », ont notamment scandé les manifestants.

Depuis la fin septembre, les combats les plus sanglants depuis près de 30 ans opposent séparatistes arméniens du Haut-Karabakh et armée azerbaïdjanaise.

L’Azerbaïdjan entend reprendre le contrôle de cette province qui a fait sécession, devenant de facto indépendante au début des années 1990 et à l’issue d’une guerre qui fit plus de 30 000 morts.

Peuplé aujourd’hui quasi exclusivement d’Arméniens, ce territoire était rattaché à l’Azerbaïdjan à l’époque soviétique, mais est considéré par les deux pays comme une partie intégrante de leur histoire.

L’annonce d’un accord de fin des hostilités intervient alors que les forces azerbaïdjanaises annonçaient avoir pris dimanche Choucha, ville stratégique à 15 kilomètres de la capitale séparatiste Stepanakert et située sur l’artère vitale reliant la république autoproclamée à son parrain arménien.

La chute de cette localité était considérée comme un tournant de la guerre. Lundi, l’Arménie disait que les combats s’y poursuivaient.

« J’ai pris cette décision [de signer l’accord] après une analyse en profondeur de la situation militaire », a dit M. Pachinian sur Facebook, en référence aux avancées azerbaïdjanaises.

Le conflit a fait au moins 1300 morts depuis le 27 septembre, selon des bilans très partiels, l’Azerbaïdjan n’ayant jamais annoncé ses pertes militaires.

Depuis des semaines, la Russie et d’autres puissances tentaient d’obtenir un cessez-le-feu, mais trois tentatives ont échoué chaque fois juste après l’entrée en vigueur de ces trêves humanitaires.

Avant l’annonce de l’accord dans la nuit de lundi à mardi, la journée avait été marquée aussi par un hélicoptère Mi-24 de l’armée russe abattu par erreur par l’Azerbaïdjan au-dessus de l’Arménie. La partie azerbaïdjanaise s’est excusée pour « cet incident tragique ».

La Russie est la puissance régionale dans le Caucase du Sud. Elle est une alliée militaire de l’Arménie, mais a aussi de bonnes relations avec l’Azerbaïdjan, deux ex-républiques d’URSS.

Russie-Turquie

 

Moscou avait mis en garde à de nombreuses reprises que le conflit du Haut-Karabakh pouvait déborder de ses frontières, sous-entendant qu’elle interviendrait le cas échéant.

L’Azerbaïdjan a, lui, le soutien de l’autre puissance de la région, la Turquie, qui a notamment été accusée d’envoyer des mercenaires pro-turcs de Syrie se battre en soutien à Bakou.

Si Moscou et Ankara sont rivaux, les présidents Vladimir Poutine et Recep Tayyip Erdogan entretiennent néanmoins une relation pragmatique.

 

Une défaite militaire au Haut-Karabakh a de quoi menacer l’avenir du premier ministre arménien, porté au pouvoir au terme d’une révolte populaire en 2018.

Dix-sept partis d’opposition, dont certains des plus importants, avaient réclamé avant même l’accord de fin des hostilités la démission de M. Pachinian et de tout son gouvernement.

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Le conflit
a fait
au moins 1300 morts depuis le 27 sep-tembre,
selon
des bilans très partiels, l’Azerbaïdjan n’ayant jamais annoncé
ses pertes militaires.