Décès probable de quatre otages américains en Irak

Washington — Des restes humains qui pourraient être ceux de civils américains disparus lors d'une attaque contre leur convoi la semaine dernière à l'ouest de Bagdad ont été trouvés dans une fosse près de l'endroit de leur disparition, a indiqué hier le département d'État.
Une porte-parole du département d'État a précisé que, bien que ces restes n'aient pas été positivement identifiés, des représentants du département avaient été en contact avec les familles des sept civils américains portés disparus depuis l'attaque de vendredi. Un autre responsable du département d'État a déclaré que les familles des sept civils avaient été prévenues que les restes découverts pourraient être ceux des disparus, étant donné qu'ils avaient été découverts près du lieu de l'embuscade.Les sept civils étaient des employés de la société Kellogg Brown and Root du groupe de services pétroliers Halliburton, qui a indiqué ne pas être encore en mesure de dire si les dépouilles découvertes étaient celles de ses employés disparus. Deux militaires américains avaient également disparu lors de cette embuscade. L'un des sept civils disparus, Thomas Hamill, un chauffeur routier de 43 ans originaire du Mississippi, avait été montré en fin de semaine dernière dans une bande vidéo diffusée par une chaîne de télévision.
Une quarantaine d'otages sont actuellement détenus en Irak, avait annoncé plus tôt hier la coalition en excluant tout marchandage, alors que la trêve était fragilisée, dans la ville rebelle de Fallouja, par des échanges de tirs et des bombardements aériens américains.
Neuf Irakiens, dont trois femmes et quatre enfants, ont été tués et 38 autres blessés dans des combats à Fallouja, un bastion sunnite à 50 km à l'ouest de Bagdad assiégé depuis neuf jours par les troupes américaines, selon des sources hospitalières.
De son côté, l'armée américaine a déploré la perte d'un Marine, lors d'un accrochage près de Fallouja, et d'un soldat, dans l'explosion d'une bombe au passage de son convoi au sud de Bagdad.
Le porte-parole de la coalition dirigée par les États-Unis, Dan Senor, a déclaré qu'il y avait «approximativement 40 otages de 12 pays» qui sont «actuellement détenus» en Irak. Il a assuré, lors d'une conférence de presse à Bagdad, que la coalition ne négocierait pas avec les ravisseurs qui réclament le retrait des différentes forces étrangères d'Irak. Selon lui, la police fédérale américaine (FBI) participe aux investigations.
Un journaliste français est devenu la dernière victime annoncée des prises d'otages. Paris a exigé «la libération sans délai ni condition» d'Alexandre Jordanov, 40 ans, de l'agence de télévision Capa, enlevé dimanche. Son collègue, le journaliste-caméraman Ivan Cerieix, a été brièvement enlevé et libéré quand ses ravisseurs ont été convaincus qu'il était Français, selon lui.
L'enlèvement ou la disparition de quatre Italiens, trois Japonais, neuf Américains, trois Tchèques et un Canadien notamment avaient été précédemment annoncées.
L'otage canadien, Fadi Ihsan Fadel, se trouverait dans la ville sainte de Najaf, au sud de Bagdad, a déclaré l'ambassadeur du Canada en Jordanie, John Holmes, précisant qu'il n'était pas maltraité.
Le Canada n'ayant pas de représentation diplomatique en Irak, M. Holmes a organisé hier une conférence de presse à Amman pour «faire passer le message à la presse locale et régionale ainsi qu'aux ravisseurs qu'il y a erreur sur la personne, qu'il est Canadien et que nous espérons qu'en conséquence, il sera libéré».
Trois employés russes et cinq ukrainiens d'une compagnie spécialisée dans l'énergie ont, eux, été libérés plus tôt dans la journée à Bagdad.
À New York, le secrétaire général de l'ONU, Kofi Annan, a souligné que la dégradation de la sécurité constituait une «contrainte majeure» à un retour de son organisation en Irak. Plusieurs pays ont appelé leurs ressortissants à quitter l'Irak.
HRW veut une enquête sur Fallouja
M. Senor a par ailleurs indiqué que le Jordanien Abou Moussab al-Zarqaoui, soupçonné par les Américains d'être à l'origine de plusieurs attentats sanglants en Irak, «serait à Fallouja ou dans les environs».
Sur le terrain, des avions de combat américains F-15 ont effectué en début de soirée plusieurs sorties au-dessus de Fallouja, ouvrant le feu sur des objectifs non identifiés, selon un journaliste de l'AFP sur place.
La trêve, sans cesse reconduite depuis dimanche à Fallouja, a été prolongée jusqu'à hier dans la nuit au moins pour permettre une issue au bras de fer entre guérilla et Marines.
Selon Fouad Raoui, un responsable du Parti islamique irakien (sunnite) qui dirige des négociations pour reconduire la trêve, plus de 600 Irakiens, pour la moitié des civils, ont été tués et 1250 blessés lors d'une semaine de féroces combats à Fallouja. L'organisation de défense des droits de l'homme Human Rights Watch a réclamé hier une enquête urgente sur le comportement des marines américains dans cette localité.
En outre, des tirs dirigés contre un hélicoptère américain près de Fallouja l'ont forcé à un atterrissage d'urgence et trois soldats ont été blessés lors des opérations de secours, selon l'armée.
À Bagdad, les forces américaines ont arrêté pendant cinq heures cheikh Hazem al-Araaji, chef du bureau dans la capitale du dignitaire radical chiite Moqtada Sadr, qui est dans la ligne de mire de la coalition depuis que ses miliciens ont défié les forces de la coalition, provoquant des affrontements sanglants.
À Najaf, où est réfugié Moqtada Sadr, des explosions ont été entendues en soirée près de la base espagnole, suivies de tirs nourris. Aussitôt après, des hélicoptères ont survolé la ville. Moqtada Sadr a affirmé hier chercher la négociation dans le conflit qui l'oppose à la coalition, tandis que les Américains massaient leurs troupes aux portes de Najaf et Kerbala pour écraser la rébellion.
Le problème «Sadr sera résolu», a déclaré le général Richard Myers, chef d'état-major interarmées américain, en visite à Bahrein, dans le Golfe.
Ces déclarations interviennent après plus d'une semaine de rébellion déclenchée par Moqtada Sadr contre la coalition dirigée par les États-Unis.
Les pays de la coalition occupante en Irak ont décidé pour l'instant de maintenir le nombre de leurs soldats mais certains envisagent déjà des réductions après l'intensification des combats et la multiplication des prises d'otages. La Pologne «prévoit diminuer son contingent plutôt que de l'augmenter», a ainsi déclaré le premier ministre polonais Leszek Miller. En décembre dernier, le président Aleksander Kwasniewski avait déjà parlé d'un «désengagement progressif» à partir de 2005.
«Il faut chercher une solution politique» pour l'Irak, qui inclurait «un plus grand engagement des Nations unies», a dit M. Miller en soulignant que l'Espagne avait fait dépendre d'une résolution de l'ONU sur l'Irak le maintien de ses soldats dans ce pays.