C'est l'«après-guerre» qui a raison des pacifistes canadiens en Irak
Ottawa - Ils sont restés sous les bombes, pendant l'invasion et les affrontements subséquents, mais aujourd'hui, des militants pacifistes canadiens se préparent à quitter l'Irak, de peur que leur présence ne mette en danger la vie des gens qu'ils tentent d'aider.
«Nous allons partir, mais à regret», a déclaré Jane MacKay Wright, du groupe Christian Peacemaker Teams (CPT), en entrevue depuis Bagdad, hier. Elle a indiqué qu'elle-même et quatre autres volontaires de CPT s'envoleraient pour Amman ce matin, et qu'ils espèrent rentrer en Irak quand la situation s'améliorera.Andréa Schmidt, du Projet Solidarité-Irak, un groupe qui a ses bureaux à Montréal, songe aussi à partir, mais n'a pas encore pris de décision.
Selon Mme Wright, la plupart des organisations humanitaires actives en Irak retirent leur personnel étranger et laissent leurs bureaux entre les mains des Irakiens.
Hier, la France et l'Allemagne ont demandé à leurs ressortissants de quitter l'Irak, et un entrepreneur russe a retiré la totalité de sa main-d'oeuvre du pays à la suite d'une série d'enlèvements d'étrangers.
Un soulèvement chiite a fait rage dans le centre et le sud de l'Irak pendant plus d'une semaine, et les forces de la coalition, dirigée par les Américains, ont aussi affronté des rebelles sunnites à Falluja. Cependant, le cessez-le-feu semblait tenir bon entre les troupes de la coalition et les combattants chiites et sunnites.
Mme Wright a expliqué que les pacifistes craignent que leur présence ne mène à des attaques contre les Irakiens qui vivent dans leur entourage ou travaillent pour eux. CPT, qui a l'appui de plusieurs Églises canadiennes et américaines, était présent à Bagdad avant même l'invasion de l'Irak. Ses militants en avaient brièvement été expulsés par Saddam Hussein, mais ils sont revenus lorsque ce dernier a été renversé.
Ils ont joué un rôle de médiateur entre les forces d'occupation et les familles d'Irakiens détenus et ont fait campagne pour défendre les droits des résidants. Selon Mme Wright, il n'y a pas de menace imminente contre les militants, mais on prend au sérieux les mises en garde invitant les étrangers à faire attention.
Selon Mme Schmidt, du Projet Solidarité-Irak, plusieurs volontaires sont déjà partis, certains s'apprêtent à le faire et «tous les autres se demandent s'ils devraient partir ou simplement se tenir bien tranquilles». «Cela a évidemment toujours été dangereux ici pour les étrangers comme pour les Irakiens, mais étant donné les enlèvements [...] les étrangers sont inquiets», a-t-elle commenté.
Mme Schmidt cherche à trouver le moyen de rester en Irak, mais il devient de plus en plus difficile de faire son travail, a-t-elle admis. «On tire sur les interprètes, le personnel irakien est harcelé. C'est dur, parce que les Irakiens qui vivent dans notre entourage ont des préoccupations bien légitimes à propos de notre présence.»