Les Casques bleus attaqués en RDC

Les forces des Nations unies sont déployées en République démocratique du Congo depuis 1999.
Photo: Alain Wandimoyi Agence France-Presse Les forces des Nations unies sont déployées en République démocratique du Congo depuis 1999.

L’attaque en République démocratique du Congo contre une base de Casques bleus tanzaniens a fait « 15 morts et au moins 53 blessés », a annoncé vendredi dans une déclaration le Conseil de sécurité, en la condamnant « dans les termes les plus forts ».

« C’est la pire attaque contre des soldats de la paix des Nations unies dans l’histoire récente de l’organisation », a réagi son secrétaire général, Antonio Guterres, se déclarant « indigné » face à ce « crime de guerre » qui a principalement touché des soldats tanzaniens.

D’après les archives de l’AFP, une force onusienne n’avait pas subi une opération aussi sanglante depuis la mort de 24 Casques bleus pakistanais à Mogadiscio en Somalie le 5 juin 1993.

Il s’agit aussi de l’attaque la plus meurtrière contre la force onusienne dans l’ex-Zaïre depuis son déploiement en 1999. Outre les quatorze morts, la Monusco a fait état de 53 blessés, dont 3 dans un état critique.

L’ONU pointe la responsabilité de membres présumés des ADF (Allied Defense Forces, Forces démocratiques alliées), un groupe armé ougandais musulman actif dans le Nord-Kivu frontalier de l’Ouganda.

Les assaillants ont visé une base, tenue par un contingent tanzanien, de la Monusco jeudi à la tombée de la nuit à Semuliki, selon des sources onusiennes, qui ajoutent que les combats ont duré trois heures.

« Des renforts militaires sont arrivés sur le terrain. Le commandant de la force se trouve aussi sur place, coordonnant la réponse de la mission », a précisé M. Guterres dans un communiqué.

Le secrétaire général a demandé « aux autorités de la RDC d’enquêter sur cet incident et de traduire promptement ses instigateurs devant la justice ».

Groupe armé

 

L’armée congolaise affirme que des dizaines d’ADF ont été tués, mais ne fait état que d’un blessé et d’un disparu dans ses rangs. « Les terroristes ADF doivent subir la force », a réagi sur Twitter le gouverneur du Nord-Kivu, Julien Paluku.

Repliés sur eux-mêmes en forêt, ne communiquant guère, les ADF combattent officiellement depuis le Nord-Kivu le régime du président Yoweri Museveni, au pouvoir depuis 27 ans dans l’Ouganda voisin.

Présents dans l’est de la RDC depuis 1995, leurs troupes ne seraient pourtant pas très nombreuses : « On les estime à 150 », indiquait récemment à l’AFP une source occidentale.

Une précédente attaque attribuée aux ADF en octobre contre une base de la Monusco dans le Nord-Kivu avait déjà tué trois Casques bleus tanzaniens.

Les ADF sont l’un des nombreux groupes armés actifs dans le Nord et le Sud-Kivu, les deux provinces orientales de la RDC frontalières de quatre pays (Ouganda, Rwanda, Burundi, Tanzanie) et de trois grands lacs (Édouard, Kivu et Tanganyika).

Civils menacés

 

Le carnage visant les Casques bleus braque les projecteurs sur l’activité de ces milices, étrangères mais surtout congolaises, qui menacent la sécurité des civils dans les deux Kivus, à 2000 km de la capitale Kinshasa.

« De juin à novembre 2017, au moins 526 civils ont été tués dans les Kivus, au moins 1087 personnes ont été enlevées ou kidnappées pour obtenir une rançon, et il y a eu au moins 11 viols de masse », indique cette semaine le tout nouveau « baromètre sécuritaire du Kivu » lancé par Human Rights Watch et le groupe d’étude sur le Congo de l’Université de New York.

Outre les groupes armés, plus de 100 morts seraient l’oeuvre des « forces de sécurité congolaises », d’après cette même source.

Le conflit dans l’est de la RDC « a été exacerbé par la crise politique générale » dans le pays, ajoute cette même source, qui vise le maintien au pouvoir du président Joseph Kabila au-delà de son deuxième et dernier mandat depuis décembre 2016.

Des élections sont prévues le 23 décembre 2018, mais le Rassemblement de l’opposition demande le départ de M. Kabila dès la fin de l’année, dans un pays où toute contestation de rue de l’opposition est systématiquement interdite et réprimée.

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