Un 5 octobre glorieux pour le Québec

Ce texte fait partie du cahier spécial Le 50e de la Délégation du Québec à Paris
En 1961, le Québec devient un nouveau joueur sur la scène internationale. Pas seulement en paroles, mais aussi en actes. N'affiche-t-on point «maison» à l'intérieur du territoire parisien?
S'il avait fallu une preuve que ce n'était plus comme avant dans la «Belle Province», que le temps d'un régionalisme à la Duplessis, où un territoire d'Amérique se défendait contre toute influence étrangère, cela fut amené quand un 5 octobre — on était en 1961 — un premier ministre du Québec, récemment élu, se rendit à Paris pour inaugurer, au 9, rue Barbet-Jouy, la Maison du Québec. Et celui qui accueillit alors Jean Lesage avait un nom dont le prestige s'était étendu jusque de ce côté-ci de l'Atlantique: André Malraux.Et quand, un soir de 1967, Gilles Vigneault et consorts reçurent les ovations d'une foule dans cet Olympia parisien, il y eut plus d'un Québécois et d'une Québécoise pour croire que le succès de ce Vive le Québec! rejaillissait sur elles et eux.
En ces jours du «réveil» québécois, l'attente était grande d'une réaction du «grand frère», qui sera dit plus tard «cousin», devant les aspirations de grandeur d'un peuple qui ne se voulait plus résigné. Et le soutien de la France fut déterminant. Que ce soit en culture, en politique, tout appui recherché fut obtenu. Et cela, au-delà même de la demande, jusqu'au jour où le général fit entendre une déclaration fracassante du haut du balcon de l'hôtel de ville montréalais.
Auparavant, en ces jours-là, le Québec découvrit toutefois qu'il y avait chez lui une littérature de qualité. Le succès, et les prix qui s'ensuivirent, en témoignait. Fierté donc quand Marie-Claire Blais reçut en 1966 le Médicis. Et qui a donc lu alors, comme par obligation, les pages de L'Avalée des avalées, car la critique française encensait l'écriture de ce Réjean Ducharme, cet auteur qui se cache si bien?
Aussi, si les films québécois sont produits avec enthousiasme, le succès d'un Pour la suite du monde semble confirmé quand, outre-Atlantique, on associe cette oeuvre à la grande tradition cinématographique documentaire. Et ainsi de suite, avec un point d'orgue lorsque Charlebois et Forestier entonnent un Lindberg dont, près d'un demi-siècle plus tard, l'air et les paroles reviennent avec aisance dans les mémoires.
Une Maison du Québec avait donc à Paris pignon sur rue. Elle sera toutefois identifiée avec une connotation plus diplomatique en se transformant en Délégation générale du Québec à Paris. Mais qui y séjourne en poste a presque un statut de diplomate: les échanges seront d'ailleurs acerbes entre le représentant canadien et le porte-parole du fleurdelisé.
Coup d'éclat
Et on voyait grand, avec de belles réalisations dont, en culture, le dernier coup d'éclat fut sans doute cette entente sur le biculturalisme que la troïka franco-canado-québécoise a imposée aux Nations Unies, obtenant gain de cause face aux impérialistes du bloc anglo-saxon: ce qui n'est pas une mince victoire.
Toutefois, cinquante ans plus tard, si on jette un regard sur cette «maison-délégation», on peut dire que, après le mot «révolution», c'est «tranquille» qu'il faut maintenant choisir pour décrire la situation actuelle.
Une normalisation s'opère, mais qui s'y opposerait quand on voit la signature d'ententes comme celle portant sur la reconnaissance professionnelle? Et, pour les entreprises d'ici, de nouveaux marchés s'ouvrent, d'autant plus que l'ancrage français fait qu'on parle maintenant d'une politique d'échanges commerciaux qui déborderaient sur toute l'Europe et incluraient la confédération canadienne.
Aussi, le présent délégué nous informe que cette orientation est voulue par les actuels dirigeants québécois: «La dimension culturelle est très importante et bien reconnue, mais la dimension économique de la relation franco-québécoise, elle, est moins connue, relate Michel Robitaille. Alors, je me suis donné pour mandat d'être très près des gens d'affaires et d'appuyer, par exemple, le cercle des dirigeants d'entreprises franco-québécoises qui réunit des dirigeants d'entreprises qui sont à la fois implantées au Québec et en France, et de les mettre en valeur.»
Voilà! Parlait-on d'affaires il y a 50 ans? Quand Shawinigan Water and Power n'avait pas encore été nationalisé au profit d'une future Hydro-Québec? Quand le Québec n'était en rien un lieu dit de pointe, encore moins dans l'univers numérique ou celui du génie aéronautique? Quand les fleurons en éducation n'avaient pas pour nom «institut» ou «chaire de recherche»?
Mais, en ces jours-là, il y eut des gens de paroles et d'images qui portaient la voix naissante de ces Français d'Amérique: le premier Québec international ne fut-il pas ainsi culturel?
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