Sondages sur l'invasion de l'Irak - Le fossé s'est creusé entre partisans et opposants à la guerre
À la suite de l'invasion américaine en Irak, le fossé s'est indéniablement creusé entre partisans et opposants à cette intervention militaire, révèle l'analyse effectuée par l'Association des études canadiennes à partir des résultats obtenus à la fin du mois d'avril lors de divers sondages d'opinion. Au Canada, subsiste toujours entre Canadiens anglais et Québécois une divergence de pensée qui calque celle observée de l'autre côté de l'Atlantique entre la Grande-Bretagne d'un côté et le duo France-Allemagne, de l'autre.
Même après vu tomber le régime despotique de Saddam Hussein, une majorité de Québécois (51 %) croient que la guerre menée en Irak par les États-Unis et leurs alliés n'était pas justifiée. Un avis que ne partagent pas les habitants du ROC où près de 60 % de la population s'accordent sur le bien-fondé de cette action militaire, qu'approuvent également 68 % des Américains et 54 % des Britanniques. Les Français (65 %) et les Allemands (68 %) demeurent quant à eux persuadés de l'incongruité de cette guerre. Tout comme 68 % des Espagnols, qui contrairement à leur gouvernement, qui s'était rangé aux côtés des administrations Bush et Blair, jugent injustifié le recours à la force en Irak.Les Canadiens sont toutefois nombreux (58 %) à penser que les récentes interventions militaires en Afghanistan et en Irak ont accru l'insécurité dans le monde. Un sentiment qui est particulièrement marqué au Québec (65 %), en France (82 %), en Allemagne (72 %), en Espagne (63 %) et en Grande-Bretagne (55 %). Seuls les États-uniens ont l'impression que le monde est plus sûr depuis que leurs militaires sont intervenus au Moyen-Orient. Ils étaient 56 % le mois dernier à croire que la guerre en Irak avait atténué la menace d'attentats terroristes. Sur cette question particulière, les Britanniques restent très partagés tandis que 67 % des Canadiens (74 % au Québec), 76 % des Français, 70 % des Allemands et 60 % des Espagnols appréhendent davantage les actes terroristes aujourd'hui qu'avant l'invasion militaire en Irak.
Alors qu'une majorité d'Américains (51 %) estime que leur pays use de «manière responsable» de sa force militaire pour régler les conflits internationaux, toutes les autres nations sondées, y compris le Québec (74 %), la France (87 %), l'Allemagne (64 %), l'Espagne (68 %) et la Grande-Bretagne (64 %), considèrent que les États-Unis sont trop empressés à intervenir militairement dans des pays étrangers.
La politique étrangère des États-Unis n'est généralement pas perçue comme étant bénéfique par la plupart des pays. Selon près de 59 % des Français interrogés, 56 % des Québécois, 49 % des Espagnols et 46 % des Allemands, les effets de cette politique sont négatifs.
Tandis que les habitants de la France (55 %), de l'Allemagne (60 %) et de l'Espagne (56 %) insistent pour que seuls les États-Unis et leurs alliés — et non les pays opposés à cette guerre — assument les coûts de la reconstruction de l'Irak, 55 % des Canadiens, 47 % des Américains et 46 % des Britanniques sont en désaccord avec une telle gestion de l'après-guerre. Pour 83 % des Français, des Allemands, des Britanniques et des Espagnols, et 79% des Canadiens contre 66 % des Américains, il va de soi que l'Organisation des Nations unies doit participer à cette reconstruction.
Au cours des trois dernières années, il apparaît clair que les liens d'amitié se sont refroidis entre États-uniens et Canadiens d'une part et resserrés entre Britanniques et Américains. Alors que 65 % des citoyens américains considéraient le Canada comme un allié de leur pays en mai 2000, ils ne sont plus que 56 % à avoir conservé ce sentiment. Le climat entre les deux voisins demeure toutefois nettement meilleur qu'entre la France et les États-Unis, dont à peine 18 % des habitants classent encore la République française parmi les alliés de leur pays, contre 50 % en mai 2000. Trente et un pour cent des Américains qualifient même la France de pays hostile à leur patrie.
Les Britanniques quant à eux ont remonté dans l'estime des Américains, puisque 79 % d'entre eux (principalement des Républicains) tiennent la Grande-Bretagne pour un fidèle allié, comparativement à 65 % en 2000. Un sentiment qui est réciproque compte tenu du fait que les États-Unis ont eux aussi gagné la faveur des Britanniques au cours de la dernière décennie. Alors qu'en 1993, à peine 15 % de ces derniers valorisaient en premier lieu les relations qu'entretenait leur pays avec les États-Unis, leur nombre a grimpé à 34 % en 2003. Durant cette même période, les liens les unissant à l'Europe se sont par contre effrités: tandis que 57 % de Britanniques soutenaient en priorité l'Europe en 1993, cet appui a fondu de 15 points en 2003.
Les États-Unis représentent désormais l'allié le plus sûr pour 73 % des habitants du Royaume-Uni. L'Australie vient au second rang avec 4 % de la faveur des Britanniques, qui ne sont par ailleurs que 1 % à nommer le Canada comme leur plus fidèle allié. On en dénombre par contre 55 % qui désignent maintenant la France comme leur allié le moins fiable.
Les sondages d'opinion sur lesquels se fonde cette analyse ont été effectués par les maisons Gallup International, Market Opinion Research International, Taylor-Nelson-Sofres, Environics et Léger Marketing.