Irak: l'heure du départ n'a pas encore sonné pour les Américains
Washington — Les nouvelles prétentions irakiennes à un calendrier de retrait des soldats américains pourraient paraître sonner l'heure du repli, mais le président George W. Bush ne semble pas vouloir presser le mouvement.
Pourtant, disait M. Bush le 24 mai 2007, «nous sommes là-bas à l'invitation du gouvernement irakien. C'est un pays souverain [...]. S'ils disaient: "Partez", nous partirions».C'est plus ou moins ce que le gouvernement irakien a dit ces derniers jours.
Alors que Bagdad et Washington négocient les termes du maintien de la présence américaine au-delà du 31 décembre, après l'expiration d'un mandat de l'ONU, les dirigeants irakiens ont pour la première fois soulevé l'idée d'un calendrier de retrait. L'un d'eux, Mouaffak al-Roubaïe, a prévenu qu'il n'y aurait pas d'accord sans date précise de désengagement.
De fait, les États-Unis et l'Irak auraient finalement renoncé à trouver un tel accord, qu'ils espéraient initialement conclure avant fin juillet, affirmait hier le Washington Post.
Selon des officiers américains anonymes cités par le quotidien, Irakiens et Américains travaillent désormais sur un document «intérimaire» qui autoriserait l'armée américaine à mener des opérations après l'expiration du mandat de l'ONU, mais ne couvrirait que 2009.
La prochaine administration américaine devrait donc hériter des pourparlers sur une présence de longue durée de l'armée américaine en Irak.
M. Bush a toujours refusé de fixer une date de retrait, malgré les tentatives de ses adversaires pour lui en imposer une, les coûts humain et financier et l'impopularité de la deuxième guerre la plus longue de l'histoire moderne des États-Unis après celle du Vietnam.
En théorie, l'administration «n'a pas le choix» puisque «l'Irak est un pays souverain et que les États-Unis n'ont pas cessé de le répéter», dit l'expert Anthony Cordesman.
Mais «il faut être très prudent», met-il en garde, car personne ne sait très bien ce que les Irakiens entendent par date précise et retrait, argumente-t-il. Un retrait pourrait laisser sur place de nombreux conseillers militaires, d'importantes forces de soutien, ou des troupes dédiées au combat contre Al-Qaïda, disent les experts.
C'est sur ce flou que joue l'administration américaine. Publiquement, elle assure que les déclarations irakiennes traduisent l'amélioration de la situation et la confiance recouvrée des autorités locales.
Mais elle rappelle son opposition à toute date fixe de fin de mission. Elle se dit ouverte à une perspective de départ «à laquelle aspirer». Et répète que ce sont les conditions sur le terrain qui doivent emporter la décision.
Moins publiquement, des responsables font valoir que les dirigeants irakiens ont intérêt à revendiquer la souveraineté de leur pays qui sera l'un des thèmes majeurs des élections provinciales d'octobre.
Le départ des Américains est une exigence primordiale de maints Irakiens, comme les partisans du radical chiite Moqtada Sadr selon lesquels un accord avec les Américains voue à un «esclavage éternel».
Selon ces mêmes responsables américains, les Irakiens reconnaissent en réalité qu'un retrait doit dépendre de ce que les Américains laisseraient derrière eux.
Ce n'est pas le seul différend à résoudre. Il y a les épineuses questions de l'immunité des soldats américains ou du statut de leurs bases.
En attendant de trancher ces questions, l'administration Bush envisage un possible retrait supplémentaire de une à trois brigades américaines sur 15 en Irak à compter de septembre, selon le New York Times. Le nombre de troupes américaines déployées passerait ainsi de 145 000 aujourd'hui à 120 000 ou 130 000 hommes.