Changements climatiques: les pays émergents peuvent poursuivre leur développement

Les pourparlers entre le G8, qui clôturait ses assises hier au Japon, et les huit pays «émergents» au sein du MEM (Major Economies Meeting) a mis en évidence hier la volonté des pays en développement d'accélérer leur développement, notamment pour mieux faire face aux changements climatiques.

Seuls l'Indonésie, la Corée du Sud et l'Australie ont appuyé l'objectif de réduction des gaz à effet de serre (GES) entériné hier par le G8, soit de réduire de 50 % d'ici 2050 les émissions d'origine humaine.

La veille, les pays du G5 — la Chine, l'Inde, l'Afrique du Sud, le Mexique et le Brésil — avaient renvoyé la balle aux pays du G8 en les invitant à assumer leur responsabilité historique dans les changements climatiques par des réductions de 25 à 40 % par rapport aux niveaux de 1990 d'ici 2020, et de 80 à 90 % d'ici 2050. Les pays du G8 ont émis depuis 1950 quelque 62 % des GES à l'origine du réchauffement du climat et les pays du G5, environ 18 %. Mais les États-Unis et le Canada refusent de s'engager dans des réductions à moyen terme si les pays du G5 n'en font pas autant.

«La Chine, a expliqué le président chinois Hu Jintao cité par Chine nouvelle, est un pays en développement et se trouve en plein processus d'industrialisation et de modernisation. Le niveau de vie de la population n'est pas encore très élevé et la principale tâche de la Chine est pour l'heure de développer l'économie et d'améliorer le bien-être de ses citoyens.»

Pour le premier ministre indien, Manmohan Singh, «il est d'autant plus urgent et impératif pour nous de créer une croissance accélérée que le changement climatique a sur nous, en tant que pays en développement, un impact disproportionné. L'Inde n'a d'autre option que d'allouer encore plus de larges ressources à l'adaptation des régions les plus menacées en termes de sécurité alimentaire, de santé publique et de gestion des ressources hydriques».

Réactions

Aux États-Unis, le Pew Center, un centre d'études des politiques publiques mis sur pied par le grand patronat étasunien, renvoyait aussi la balle aux pays développés. Sa présidente, Eilen Claussen, reconnaissait que le président Bush avait certes fait «un pas en avant» en adhérant à un premier objectif chiffré de réduction des GES, «mais que ce qui est impératif — et ce qui manque —, c'est une déclaration sans ambiguïté des pays industrialisés qu'ils sont prêts à négocier des objectifs de réduction à moyen terme, musclés et obligatoires».

Les écologistes étaient pour leur part déçus en général de la rencontre du MEM parce que personne ne s'y est engagé à quoi que ce soit de précis. Certains étaient plus cyniques, comme Alden Meyer, de la Union of Concerned Scientists des États-Unis.

«La seule bonne nouvelle de ce sommet, c'est que c'est le dernier de Bush sur le climat», disait-il.

Pour Antonio Hill, d'Oxfam, les réunions du MEM, à l'initiative de George Bush, n'ont «jamais apporté rien de constructif aux négociations de l'ONU et elles visent uniquement à créer une diversion».

Mais ce n'était pas l'avis de l'Agence internationale de l'énergie (AIE), qui a réagi aux travaux du G8 et du MEM par un long communiqué et un document expliquant comment la communauté internationale pourra à la fois sortir de la troisième crise du pétrole — la première pour les pays émergents! — et de la crise du climat.

En plus d'y aller de 25 recommandations, l'AIE estime que l'Occident peut rapidement réduire d'ici 2030 de 8 Gt (gigatonnes ou milliards de tonnes) ses émissions de GES — sur un total de 27 Gt — si elle s'attaque à la consommation d'énergie de son parc immobilier et aux modes de transport trop énergivores.

L'objectif de réduction de moitié des émissions de GES d'ici 2050 est réaliste, selon l'AIE, si tous les pays facilitent par des politiques publiques les investissements dans les énergies alternatives neutres ou pauvres en carbone, dans le nucléaire, et dans la séquestration et l'enfouissement du carbone des centrales thermiques. Il en coûtera 1,1 % du PIB mondial pour y arriver, précise l'organisme international, ce qui permettra d'assurer croissance et sécurité climatique.

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