Irak: double indice de sursis
L'AIEA va demander lundi au Conseil de sécurité de l'ONU de lui accorder plusieurs mois pour poursuivre ses inspections en Irak, a indiqué un porte-parole, tandis que la Maison-Blanche faisait savoir que le discours sur l'état de l'Union que le président Bush prononcera le lendemain préviendra les Américains de l'éventualité d'un conflit armé en Irak mais ne sera pas une déclaration de guerre.
L'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) estime que l'Irak ne coopère pas encore assez activement avec ses inspecteurs pour prouver qu'il ne conserve pas d'armements prohibés depuis la guerre du Golfe, en 1991. Mais dans l'ensemble, «le bilan de la coopération n'a pas été mauvais», a indiqué son porte-parole, Mark Gwozdecky.Mohamed el-Baradei, directeur général de l'AIEA, va demander «quelques mois pour parvenir à des conclusions» sur le désarmement irakien en présentant lundi au Conseil de sécurité un rapport sur les deux premiers mois d'inspections. «Nous avons toujours clairement fait savoir qu'on ne peut pas mener d'inspection concluante en Irak en huit semaines [...]. Il est prématuré d'arrêter le processus d'inspections, mais nous servons le Conseil de sécurité et nous nous rangeons à ses décisions», a-t-il ajouté.
Les inspections de l'ONU ont repris le 27 novembre dernier après avoir été interrompues en décembre 1998. M. el-Baradei, comme son collègue Hans Blix, chef de la Commission de contrôle, d'inspections et de vérification des Nations unies (COCOVINU) qui recherche des armes chimiques, biologiques et des missiles à longue portée que l'Irak dissimulerait, ont répété ces derniers jours qu'il leur fallait du temps pour mener leur mission à bien.
Les déclarations
se multiplient
Les États-Unis multiplient cependant les déclarations laissant entendre que le temps n'est plus aux inspections et que l'Irak a déjà démontré qu'il trichait une fois de plus avec le Conseil de sécurité. M. Gwozdecky a cependant indiqué que de «hauts dirigeants américains» ont à plusieurs reprises renouvelé leur confiance à l'AIEA.
Le rapport de lundi soulignera que nous «sommes seulement sur le point de tourner à plein régime et, une fois que nous le ferons, il nous faut pouvoir maintenir des inspections intenses pendant une période prolongée», a poursuivi le porte-parole.
L'AIEA, organe de l'ONU basé à Vienne, a mené quelque 130 inspections sans rencontrer de difficultés pour accéder aux sites. Mais l'Irak doit coopérer plus activement avec les recherches, a souligné le porte-parole. Les autorités de Bagdad devraient fournir spontanément tous les documents relatifs à leur programme nucléaire et encourager ses chercheurs à accorder des entrevues en tête-à-tête avec les inspecteurs.
Le numéro deux du Pentagone, Paul Wolfowitz, avait affirmé jeudi que Saddam Hussein avait ordonné l'exécution de tous les scientifiques irakiens qui coopéreraient avec les inspecteurs de l'ONU ainsi que celle de leurs familles. L'AIEA n'a jusqu'à présent interrogé que deux chercheurs qui, tous les deux, ont insisté sur la présence d'un autre Irakien, a précisé le porte-parole. Elle n'a pas encore tenté d'interroger des experts irakiens en dehors d'Irak, comme le recommande la dernière résolution des Nations unies.
Le discours sur l'état de l'Union que le président Bush prononcera mardi ne sera pas une déclaration de guerre, a souligné hier son directeur pour la communication, Dan Bartlett. Prononcé annuellement devant le Congrès, ce discours constitue une déclaration de politique générale de la part du président des États-Unis. George W. Bush avait utilisé cette tribune l'an dernier pour dénoncer les pays de «l'axe du mal».
M. Bush, qui doit remettre son mandat en jeu en novembre 2004, va tenter de maintenir l'équilibre entre les questions internationales et les affaires intérieures alors que l'économie américaine est faible.
Le discours sera également l'occasion pour George W. Bush de préciser son programme de réformes des systèmes de santé et de retraites et d'initiatives pour éliminer les «poches de désespoir» aux États-Unis.
Sur l'Irak, M. Bush répète à l'envi qu'il rassemblera une coalition pour obliger le dirigeant irakien Saddam Hussein à désarmer par la force si celui-ci refuse de le faire volontairement. Mais il ne présentera pas mardi de nouvelles preuves pour appuyer les accusations américaines contre l'Irak. «Il ne s'agit pas de présenter un nouveau réquisitoire, a indiqué Dan Bartlett. C'est davantage, pour le président, une occasion de parler de la menace générale posée par ce régime, pourquoi nous l'affrontons et pourquoi il peut-être nécessaire d'aller en guerre.»
M. Bartlett a rappelé que le président américain «a choisi la voie diplomatique et que cette voie entre dans sa phase finale».