Une présidentielle cruciale pour la Serbie
Belgrade — La Serbie se prépare à une élection présidentielle cruciale pour son avenir, qui opposera demain (dimanche) un candidat favorable à l'UE à un ultranationaliste avant la perte inéluctable du Kosovo, province qui est à l'origine de l'histoire et de la culture serbe.
Le président pro-UE Boris Tadic, 50 ans, qui brigue un second mandat, et l'ultranationaliste Tomislav Nikolic, 55 ans, sont au coude à coude dans les sondages devant sept autres candidats. Un second tour, le 3 février, devrait être nécessaire pour les départager.En Serbie, le pouvoir du chef de l'État est relativement limité, mais l'image qu'il donne de son pays à l'extérieur a valeur de symbole.
Les États-Unis et l'Union européenne souhaitent la réélection de M. Tadic. Il apparaît comme le plus à même de résister à une probable poussée nationaliste en Serbie lorsque les leaders albanais du Kosovo proclameront l'indépendance à laquelle Belgrade, fortement soutenue par la Russie, est farouchement opposée.
Depuis Sofia, où il effectue une visite de deux jours, le président russe Vladimir Poutine a renouvelé son soutien et même haussé le ton en déclarant qu'une proclamation unilatérale d'indépendance des leaders kosovars serait «illégale et immorale».
Alors que les négociations entre Serbes et Kosovars ont amplement montré qu'aucun compromis n'était possible, le président russe a réitéré la position de son pays et appelé à les reprendre.
La Russie, qui dispose d'un droit de veto au Conseil de sécurité de l'ONU, y a fait échouer tous les projets de résolution sur le Kosovo, favorables à l'indépendance, que les pays occidentaux ont présentés.
Une éventuelle défaite de M. Tadic est redoutée par les Occidentaux, Européens en tête, car elle risque, de leur point de vue, d'entraîner une nouvelle période d'isolement vis-à-vis de l'UE, accompagnée d'un net rapprochement avec la Russie.
Les Européens redoutent toutefois qu'un soutien trop appuyé à M. Tadic ne profite à son adversaire, qui ne cache nullement ses sentiments russophiles. Ils ont quand même fait un petit geste en faveur de M. Tadic en annonçant que les visas nécessaires aux Serbes pour voyager dans l'UE pourraient à terme être supprimés.
L'UE, qui a pris en main le dossier du Kosovo, doit envoyer dans la province, après la présidentielle serbe, une mission de police et justice pour prendre la relève de celle de l'ONU, qui administre le Kosovo depuis la fin du conflit de 1998-99.
À l'invitation de la présidence semestrielle slovène de l'UE, une réunion des membres européens du Groupe de contact sur le Kosovo (Allemagne, France, Grande-Bretagne et Italie) doit se tenir aujourd'hui à Brdo, près de Ljubljana. Apparemment, cette réunion aura lieu sans représentants des États-Unis et de la Russie, les deux autres pays parties prenantes au Groupe de contact.
Belgrade a paraphé en novembre avec Bruxelles un Accord de stabilisation et d'association, premier pas vers l'intégration de la Serbie à l'UE. M. Tadic souhaite le signer aussi vite que possible, même s'il reste, comme la quasi-totalité des dirigeants serbes, totalement opposé à l'indépendance du Kosovo, considéré comme le berceau historique et culturel de la Serbie.