Somalie - Mogadiscio s'enfonce dans le chaos

Mogadiscio — La capitale somalienne Mogadiscio était en proie au chaos hier, ravagée par de nouveaux combats qui poussaient les civils à prendre la fuite, tandis que des soldats éthiopiens ont tiré sur des manifestants, tuant trois d'entre eux.
Les forces gouvernementales somaliennes et les insurgés islamistes s'affrontaient en plein jour dans le sud de la ville, pour la deuxième journée consécutive, ont indiqué des témoins.«Je vois des insurgés qui scandent "Allahu Akbar [Dieu est grand]", ils sont accroupis juste devant ma porte, et des forces somaliennes dans des blindés qui ouvrent le feu», a raconté à l'AFP Anab Ali, un habitant du quartier de Hodan, dans le sud de Mogadiscio. La veille, six civils avaient été tués dans des combats opposant les islamistes aux forces somaliennes et éthiopiennes.
Terrorisés par cette nouvelle éruption de violence, des centaines de civils tentaient de s'enfuir, chargeant leurs affaires dans des pick-up ou à dos d'âne. «Personne ne peut supporter ce qui ce passe à Mogadiscio, cette violence sans interruption, qui fait des centaines de morts chaque semaine», a déclaré à l'AFP Abdurahman Nure, un habitant du sud de la ville, qui s'enfuyait avec ses enfants à bord d'un véhicule Land Cruiser.
Depuis la chute début 2007 des tribunaux islamiques, chassés des régions qu'ils contrôlaient par les forces gouvernementales appuyées par l'armée éthiopienne, la violence est allée en s'accroissant à Mogadiscio. Les civils sont les principales victimes.
«Les insurgés attaquent le gouvernement et les forces éthiopiennes presque chaque jour désormais», a expliqué Fartun Adan Mohamed, mère de trois enfants, qui tentait elle aussi de quitter la ville. «Chaque fois, nous, les civils, sommes la cible de l'armée éthiopienne et des forces somaliennes, et fuir est notre seule option», a-t-elle ajouté.
La violence, qui se déroulait principalement la nuit jusqu'à récemment, se déchaîne aussi de jour désormais, rendant certains quartiers de la capitale invivables. Un journaliste de l'AFP a constaté que des centaines de civils quittaient hier les zones d'Ali Kamin et de Hamar-Jadid, dans le sud de Mogadiscio.
Dans ce contexte, des centaines de personnes ont défilé hier dans les rues de la capitale pour protester contre la présence éthiopienne, aux cris de «À bas l'Éthiopie! À bas le gouvernement somalien!», mais la manifestation s'est achevée dans le sang.
Répression
Les forces éthiopiennes ont ouvert le feu et tué trois personnes, selon des témoins. «Un jeune garçon et deux autres civils ont été tués quand les forces éthiopiennes ont ouvert le feu. Nous étions en train de manifester contre eux et ils ont tiré pour disperser la foule», a déclaré à l'AFP un des manifestants, Hussein Adan Suley. «Nous avons couru lorsque les Ethiopiens ont tiré. Je sais qu'un enfant a été tué», a déclaré un autre témoin, Asma Wardhere.
Les manifestants ont incendié un commissariat de police, le deuxième a être brûlé en deux jours dans le sud de Mogadiscio, a déclaré le maire de la ville, Mohamed Omar Habeb.
Un officier de police a confirmé que trois personnes avaient été tuées lors de cette manifestation.
Cet officier a également indiqué que deux autres personnes avaient été tuées par ailleurs: un homme, abattu dans la zone du marché de Bakara par des inconnus, et un policier, tué dans des circonstances qui n'ont pas été dévoilées.
Côté politique, le gouvernement de transition somalien, déjà très affaibli, semblait sur le point de se désintégrer. À Baïdoa, à 250 km au nord ouest de Mogadiscio, le président Abdullahi Youssouf Ahmed exhortait les députés à limoger le premier ministre Ali Mohamed Gedi, avec qui il est en conflit.