Bagdad accuse les inspecteurs d'espionnage
Bagdad - Les relations entre l'Irak et les inspecteurs de l'ONU se sont brusquement détériorées hier pour la première fois depuis la reprise de leurs missions dans ce pays il y a une semaine, après leur visite à l'improviste de l'un des palais du président Saddam Hussein.
«Leur travail est un travail d'espionnage au profit de la CIA et du Mossad», les services de renseignement américains et israéliens, a déclaré le vice-président irakien Taha Yassine Ramadan. Les inspecteurs ne sont pas venus pour s'assurer que l'Irak ne possède pas d'armes de destruction massive, mais ils sont venus pour fournir de meilleures conditions et des informations plus précises pour l'attaque à venir» contre l'Irak, a déclaré le vice-président irakien.Les États-Unis et plusieurs de leurs alliés mèneront pendant une semaine, à partir du 9 décembre, des manoeuvres militaires dans la région du Golfe qui pourraient servir à préparer une éventuelle intervention militaire américaine en Irak, a indiqué le Pentagone. Cet exercice sera coordonné du Qatar, où le Commandement central a déployé un quartier général provisoire avec quelque 600 spécialistes pour coordonner une éventuelle offensive contre Saddam Hussein.
Les scénarios de ces manoeuvres sont tenus secrets. «Ils porteront sur un nombre de situations d'urgence pouvant intervenir dans les 25 États» rattachés à la région du Commandement central, «l'Irak n'étant pas le seul État en considération», a assuré un responsable militaire américain.
Pétrole contre nourriture pour six mois
Les États-Unis sont prêts à accepter sous conditions le renouvellement pour six mois du programme «Pétrole contre nourriture» destiné à la population irakienne, a-t-on indiqué hier de sources diplomatiques au Conseil de sécurité de l'ONU. Les membres du Conseil, qui étaient hier soir réunis à huis clos pour consultations, devaient étudier la proposition américaine avant qu'elle fasse l'objet d'un vote en séance publique. Le programme, qui vise à limiter l'impact sur la population civile irakienne des sanctions contre le régime de Bagdad, arrivait à échéance à minuit.
Hier, les inspecteurs de l'ONU ont visité des installations abandonnées à Al-Muthanna, au nord de Bagdad, liées avant la guerre du Golfe (1991) au programme nucléaire, chimique et biologique irakien.
Une autre équipe d'inspecteurs a visité pendant près de cinq heures le centre de recherche nucléaire d'Al-Tuwaitha, à une vingtaine de kilomètres au sud de Bagdad, qui était le principal centre de recherche nucléaire en Irak et produisait de l'uranium enrichi. Un de ses réacteurs (Osirak) avait été bombardé et détruit par l'aviation israélienne en juin 1981. Des échantillons d'air, d'eau et de terre ont été prélevés et seront analysés «sous quinzaine», selon un porte-parole de l'ONU.
Face aux menaces américano-britanniques, la Russie et l'Inde ont averti hier être fermement opposées à «l'usage unilatéral de la force» en Irak. La Turquie, de son côté, demeure réservée sur son degré de coopération avec les États-Unis en cas de guerre contre l'Irak, alors qu'un haut responsable américain estime le soutien d'Ankara à son pays acquis.
Le premier ministre turc Abdullah Gul a affirmé hier que la Turquie ne s'était pas engagée formellement à coopérer en cas d'intervention militaire des États-Unis contre l'Irak, quelques heures après la visite à Ankara du numéro deux du Pentagone, Paul Wolfowitz. Ce dernier a affirmé pour sa part que «le soutien de la Turquie est assuré».
«Le gouvernement n'a pas pris de décision politique finale sur ce dossier et ne s'est engagé à respecter aucune obligation», selon un communiqué des services du premier ministre.
Ce communiqué faisait suite à des propos du ministre turc des Affaires étrangères, Yasar Yakis, qui avait affirmé mardi qu'Ankara était prêt à coopérer avec Washington en ouvrant ses bases aux avions américains. «Nous sommes prêts à coopérer avec les États-Unis» en cas de guerre contre l'Irak.
Hier, M. Yakis a souligné devant des journalistes qu'il avait répondu à une question hypothétique. «J'ai indiqué que nous ne laissions pas les portes fermées... La Turquie n'a rien garanti aux États-Unis», a-t-il déclaré. «Nous avons reçu de très fortes affirmations de soutien de la Turquie aux États-Unis dans cette crise avec l'Irak», avait affirmé M. Wolfowitz hier matin. Il a cependant affirmé que Washington n'avait pas encore demandé un soutien militaire précis de la Turquie.