Bagdad adopte le fédéralisme

Bagdad — Le Parlement irakien a définitivement adopté hier la loi créant un État fédéral en dépit des craintes que cette réorganisation de l'État suscite au sein de la communauté sunnite. L'adoption de cette loi a été immédiatement saluée par les chiites et critiquée du côté sunnite.

À la suite d'un compromis survenu fin septembre entre chiites et sunnites, cette loi ne pourra s'appliquer que 18 mois après son adoption pour le temps de procéder parallèlement à une révision de la Constitution, susceptible d'apporter des apaisements aux sunnites.

La modification des structures administratives et politiques du territoire inquiète les sunnites, qui craignent d'être isolés parce que leurs régions, situées essentiellement dans l'ouest du pays, sont largement désertiques et privées de pétrole. En revanche, les neuf provinces chiites du sud sont immensément riches en pétrole. Quant aux Kurdes, ils ont tranquillement organisé leurs trois régions autonomes depuis 1991, disposent de richesses pétrolières et sont naturellement favorables au fédéralisme.

Les chiites voient dans le fédéralisme une protection contre le retour d'un pouvoir dictatorial centralisateur à Bagdad.

Pour tenter de trouver une formule qui n'implique pas seulement les chiites et les Kurdes, les députés ont approuvé fin septembre un compromis visant à rassurer les sunnites: ils ont accepté de préparer une révision de la Constitution à travers laquelle les sunnites entendent bien faire passer des règles mettant des limites au fédéralisme. Ce compromis s'est aussitôt concrétisé avec la mise en place de la commission chargée de préparer la révision de la Constitution.

Le calendrier a été soigneusement étudié: la révision de la Constitution doit être prête en un an. La Constitution, adoptée en octobre 2005, prévoit que la structure de l'État soit fédérale avec la possibilité pour les provinces de se regrouper en régions autonomes en tenant des référendums. C'est ce mécanisme de formation des régions autonomes que la nouvelle loi précise.

Les sunnites s'efforceront notamment d'obtenir que la Constitution plafonne le nombre de provinces actuelles qui pourront demain se regrouper pour former une région fédérale, l'objectif étant d'empêcher la création d'une super-région chiite unique à laquelle répondrait probablement une grande région kurde. L'Irak se trouverait alors divisé en trois régions (chiite, kurde, sunnite), ce qui mettrait en péril son unité et risquerait d'exacerber les divisions actuelles.

Les sunnites désirent également que le fédéralisme respecte un partage équitable des richesses nationales (en premier lieu le pétrole), ce qui implique que le pouvoir central continue à avoir un pouvoir de décision.

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