Importations chinoises - Les syndicats du vêtement exigent le retour des barrières tarifaires

Travailleuse dans une usine de confection de vêtements à Hefei, en Chine.
Photo: Agence France-Presse (photo) Travailleuse dans une usine de confection de vêtements à Hefei, en Chine.

Les travailleurs du vêtement ne trouvent toujours pas l'appui espéré auprès des gouvernements et des entreprises dans leur bataille contre les importations chinoises. Ils continuent néanmoins à se démener pour obtenir le rétablissement, au moins temporaire, de barrières commerciales ainsi que la mise en place de politiques d'aide à la reconversion.

Un autre fabricant de vêtements montréalais s'apprête à déménager sa production en Asie. Établi au Québec depuis 1938, Cardinal Clothes fera bientôt fabriquer en Chine les manteaux haut de gamme (Joseph Abboud, Ted Baker, Ike Behar, Jack Victor, etc.) qu'il confectionnait jusque-là à son usine de la rue Saint-Viateur. Les dizaines d'employés québécois directement concernés se retrouveront au chômage avant la fin du mois.

Leurs représentants syndicaux du Conseil du Québec UNIS (FTQ), ainsi que le député fédéral de la circonscription, le chef du Bloc québécois Gilles Duceppe, ont saisi l'occasion pour convoquer une conférence de presse, aujourd'hui, visant notamment à convaincre le gouvernement fédéral de mieux «se battre pour sauvegarder les emplois québécois» dans le secteur. Ils voudraient, entre autres choses, qu'Ottawa se décide enfin à se prévaloir de son droit de rétablir, pendant au moins quelques mois, des barrières commerciales contre les importations chinoises. Véritable capitale de l'industrie du vêtement au Canada, Montréal devrait voir ses travailleurs descendre dans les rues du centre-ville lors d'une grande manifestation le 20 octobre.

Les derniers contingentements à l'importation dans les secteurs du vêtement et du textile ont été abolis au début de 2005 au terme d'un processus étalé sur dix ans. Les règles de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) permettaient cependant à ses pays membres de les rétablir pour une période supplémentaire de trois ans à titre de mesure de sauvegarde, s'ils estimaient leurs industries en grave danger. Une telle mesure permettrait de limiter jusqu'en 2008 à 7,5 % l'augmentation annuelle des importations chinoises. Plusieurs gouvernements, dont celui des États-Unis, se sont prévalus de ces dispositions, alors que d'autres, comme celui de l'Union européenne, ont négocié avec la Chine une réduction volontaire de ses exportations.

Au Canada, il n'y a que les entreprises et les gouvernements qui peuvent formellement porter plainte au Tribunal canadien du commerce extérieur afin que de telles mesures soient mises en place. Les syndicats ont bien cherché à y forcer leur chemin l'été dernier, mais sans succès.

Selon ces derniers, il ne fait aucun doute que l'industrie canadienne, qui comptait l'an dernier 140 000 travailleurs, dont 55 % au Québec, est en péril. On affirme même qu'elle aurait rétréci de 25 % depuis janvier 2004.

Pour ou contre les barrières

Selon les experts, les entreprises canadiennes ne sont pas intéressées par le retour des quotas parce qu'elles leur prêteraient bien peu d'efficacité en cette ère de concurrence mondialisée et de dollar canadien fort. De plus, ces entreprises auraient déjà bien trop recours aux importations chinoises pour pouvoir s'en passer.

Pour ses partisans, le retour, même temporaire, des barrières commerciales accorderait plus de temps aux entreprises pour se trouver de nouveaux créneaux moins exposés à la concurrence des pays à faibles coûts de main-d'oeuvre. Ce geste de défense devrait cependant s'accompagner de mesures supplémentaires visant à aider cette reconversion de l'industrie ainsi que le reclassement de ses travailleurs. Quant à ceux parmi eux qui seraient trop âgés pour apprendre un nouveau métier, ils devraient avoir droit à un programme public de soutien au revenu jusqu'à l'âge de la retraite.

Les femmes et les immigrants se retrouvent en forte proportion dans l'industrie canadienne du vêtement. On estimait, en 2004, que 43 % de ses travailleurs étaient âgés de 45 ans et plus, et que 67 % ne détenaient pas de diplôme d'études secondaires.

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