Élections régionales au Cachemire - Défaite cinglante pour les protégés de New Delhi

La joie chez les partisans du PDP.
Photo: Agence Reuters La joie chez les partisans du PDP.

Islamabad - Un «séisme politique». C'est ainsi que certains commentateurs en Inde ont qualifié la cinglante défaite du parti de la Conférence nationale (NC), jeudi, aux élections de l'assemblée du Cachemire. La dynastie des Abdullah, qui régnait sur le Cachemire (seul État indien à majorité musulmane) quasiment depuis l'indépendance de l'Inde, va devoir céder sa place à une coalition nouvelle qui devrait se nouer entre le Parti du Congrès, principal parti d'opposition indien, et un parti local, le Parti démocratique du peuple (PDP).

Alliée à New Delhi au Parti du peuple indien (BJP) du premier ministre Atal Bihari Vajpayee, la Conférence nationale paie sa proximité avec le gouvernement central, honni par la majorité des Cachemiris, et surtout la corruption et la négligence de ses cadres, en particulier du ministre en chef sortant, Farouk Abdullah.

«Sous Farouk, la NC a incarné une classe dirigeante corrompue, totalement aux ordres de New Delhi et prospérant sur les souffrances des Cachemiris», commente Javed Mir, un responsable indépendantiste.

Sentant venir la défaite, Farouk Abdullah avait tenté en juin de confier la direction du parti à son fils Omar, 32 ans, vice-ministre fédéral des Affaires étrangères. Mais cela n'a pas suffi et Omar Abdullah n'a pas même pu conserver le siège familial de Ganderbal que n'avaient jamais perdu son grand-père et son père. La NC, qui avait 57 sièges sur 87 dans l'assemblée sortante de 1996, n'en a plus que 28, alors que 20 sièges vont au Parti du Congrès de Sonia Gandhi, 16 au PDP de Mufti Mohammed Sayeed, un au BJP (au lieu de six), le reste des sièges allant aux indépendants et aux petits partis. La NC a reconnu sa défaite et annoncé qu'elle ne chercherait pas à nouer des alliances pour rester au pouvoir.

Malgré les mauvais scores de son parti, M. Vajpayee s'est réjoui des résultats en affirmant que «le vainqueur est clairement la démocratie indienne». Il s'est félicité du taux de participation de 44 %: «Bravant la terreur entretenue par les groupes terroristes soutenus par le Pakistan et négligeant l'appel au boycottage des élections — lancé par les mouvements séparatistes de la Conférence des partis pour la liberté —, le peuple du Jammu, du Cachemire et du Ladakh a participé en grand nombre au scrutin.»

C'est maintenant à New Delhi de jouer. Déjà les acteurs locaux peuvent se réjouir du fait que la promesse d'élections libres et honnêtes semble avoir été tenue. Comme la NC, les partis appelés à former le nouveau gouvernement sont en faveur du maintien du Cachemire dans l'Union indienne et, sur ce point, New Delhi n'a rien à craindre. Ils pourraient toutefois se montrer plus pressants pour obtenir la très large autonomie qu'à défaut d'indépendance les Cachemiris pourraient peut-être accepter sous conditions. M. Vajpayee a déjà affirmé que «le centre [New Delhi] travaillerait en coopération étroite avec les représentants élus pour combler les aspirations du peuple».

Autre signe positif pour l'avenir du dialogue: la Conférence des partis pour la liberté s'est réjouie de la défaite de la NC, en rappelant que le Congrès comme le PDP avaient appelé à des négociations inconditionnelles avec les séparatistes. Sans ceux-ci, aucune solution n'est possible au Cachemire. Mais leur participation active sera difficile à obtenir sans l'ouverture d'un dialogue avec le Pakistan, qui contrôle un tiers du Cachemire.

À voir en vidéo