La menace Saddam - Bush et la CIA diffèrent d'avis
Washington - La Maison-Blanche a fait savoir hier qu'elle reste convaincue du danger que font courir aux États-Unis les armes de destruction massive dont le président irakien Saddam Hussein est censé disposer. Mais le porte-parole de la Maison-Blanche, Ari Fleischer, a dit ne pas voir de contradiction entre cette appréciation et celle qu'a adressée par écrit la CIA à la Commission du renseignement du Sénat.
Ce document affirme qu'à moins de subir une attaque américaine, Bagdad semble exclure dans un avenir prévisible «des attentats terroristes contre les États-Unis au moyen d'[armes] conventionnelles ou chimiques et biologiques».«Nous refusons de vivre dans la peur», avait déclaré lundi le président George Bush à propos de l'arsenal irakien, estimant que Saddam Hussein pouvait «à tout moment décider de fournir une arme biologique ou chimique à des terroristes».
L'Irak dément posséder ce genre d'armes, comme Washington l'en accuse, mais Ari Fleischer a fait valoir ceci: «Si Saddam Hussein pointe son pistolet sur la tempe de quelqu'un en démentant avoir jamais eu de pistolet, êtes-vous prêts à parier qu'il ne va pas l'utiliser?»
Pour M. Fleischer, le document de la CIA montre surtout que la probabilité que Saddam Hussein utilise ces armes «pour se livrer à du chantage, à de l'intimidation ou à autre chose encore croît en proportion du développement de son arsenal».
Acculé au mur
Selon la lettre de la CIA, dont le directeur George Tenet affirme aussi qu'elle ne contredit pas la position de Bush, «si Saddam Hussein conclut qu'une attaque américaine ne peut plus être empêchée, il se sentira probablement beaucoup moins gêné de recourir à des actions terroristes».
Le document des services de renseignement américain n'est toutefois pas de nature à infléchir la tendance actuelle du Congrès en faveur d'une résolution accordant au président un feu vert pour agir contre l'Irak si nécessaire.
Le vote pourrait survenir cette semaine à la Chambre des représentants et la semaine prochaine au Sénat, où le chef de la Maison-Blanche s'est heurté à de plus fortes réserves.
La tendance actuelle du Sénat a été résumée par les propos du sénateur démocrate Harry Reid, qui a déclaré à l'adresse de Bush fils: «Nous n'avons pas engagé le monde entier à nos côtés, comme votre père l'avait fait si magnifiquement [en 1991], nous n'avons convaincu ni notre peuple ni le monde que le droit international est de notre côté. Mais si vous croyez le moment venu de recourir à la force, cette résolution vous y autorise. Cependant, je vous fais confiance pour l'utiliser sagement. En tant que président des États-Unis, vous êtes le leader du monde libre, mais pas son souverain.»