Le mouvement pacifiste prend de l'ampleur aux États-Unis
New York — Un mouvement pacifiste, très opposé aux projets de guerre préventive contre l'Irak, est né il y a quelques mois aux États-Unis et semble prendre de l'ampleur, mobilisant des milliers de personnes dans le pays. Dans les semaines qui ont suivi les attaques du 11 septembre l'an dernier, la vague de patriotisme qui avait déferlé sur l'Amérique avait mis le mouvement pacifiste américain dans une position difficile.
Mais, alors que les tambours d'une guerre possible contre le régime de Saddam Hussein battent de plus en plus fort, les opposants à l'usage de la force militaire s'organisent et se font entendre avec de plus en plus de véhémence.Ils étaient 15 000 à 20 000 dimanche, dont plusieurs acteurs connus, pour un meeting organisé sur l'une des pelouses de Central Park, à New York. Des rassemblements similaires ont eu lieu dimanche à San Francisco (quelque 5000 personnes), Los Angeles (environ 3000), Portland (Oregon, 5000), Seattle (6000 à 8000), Chicago, Houston, Atlanta et deux douzaines d'autres villes plus petites. Ces réunions ont eu lieu à l'appel d'un collectif d'associations «libérales» (de gauche) et pacifistes regroupées sous le nom de «Not in our name» («Pas en notre nom» — site Internet: www.notinourname.net). Il fait circuler une déclaration «anti-guerre contre l'Irak» que de nombreuses vedettes du monde culturel (l'écrivain Gore Vidal, le réalisateur Oliver Stone, les acteurs Jessica Lange, Danny Glover, Susan Sarandon, Tim Robbins, Jane Fonda, Martin Sheen) ont déjà signé.
Prenant le micro sur la scène de Central Park, Susan Sarandon a lancé à une foule colorée et enthousiaste: «Ici, nous pouvons imaginer les conséquences que pourrait avoir une guerre sur des êtres humains dont nous verrons jamais les visages, dont nous ne saurons jamais les noms ou le nombre, tous tués préventivement en notre nom.»
Plusieurs orateurs ont demandé aux manifestants de contacter leurs élus pour leur dire leur opposition à une campagne militaire contre Bagdad et ont fait copieusement conspué le président George W. Bush. «Dans ce pays, lorsque Bush lance: "Vous êtes avec nous ou avec les terroristes", il s'agit d'un effort délibéré pour décourager les gens de s'exprimer», estimait récemment Mary Lou Greenberg, l'une des fondatrices de «Not in our name».
Ce mouvement, particulièrement présent dans les campus universitaires, rassemble d'anciens opposants à la guerre du Vietnam, des membres des organisations anti-mondialisation et des figures traditionnelles de la gauche américaine.
Ils devraient être confortés par les résultats d'un sondage publié hier par la chaîne CBS et le New York Times, selon lequel 56 % des personnes interrogées sont opposées au lancement de guerres préventives, et les deux tiers souhaitent qu'avant d'envisager l'option militaire, les inspecteurs en désarmement de l'ONU puissent mener à bien leur mission en Irak.