La rentrée en 5 bédés prometteuses

Couennes dures,
Val-Bleu
L’autrice montréalaise Val-Bleu (Valérie Jacques-Bélair) nous proposera, avec Couennes dures (Mécanique générale, 8 novembre), un récit de voyage mettant en vedette Raphi, une jeune femme dans la vingtaine qui vient de subir un accident de vélo. Elle décide de partir en Inde pour rédiger son mémoire de maîtrise portant sur les déesses hindoues. En chemin, elle fera la rencontre de trois jeunes villageoises qui traversent, elles aussi, une partie du désert en évitant les villes, fuyant les persécutions qu’elles pourraient subir parce que l’une d’elles porte une moustache. Un périple singulier, donc, qui n’est pas sans évoquer le voyage transformant entrepris par Che Guevara et si fabuleusement raconté par Walter Salles dans son film Carnets de voyage, c’est-à-dire aller à la rencontre de l’autre pour se trouver soi-même. Et comme Val-Bleu a le chic de nous présenter des personnages bien construits, pleins d’humanisme et d’humour, cela risque de nous donner envie, à nous aussi, d’aller voir ailleurs si l’autre y est…
Voler au-dessus de trous,
Catherine Lepage
Nous avions beaucoup aimé Bouées, de Catherine Lepage, une bande dessinée dans laquelle elle raconte sa vie romantique et ses dérives au secondaire durant les années 1980, un récit tendre, drôle et nostalgique à la fois. L’autrice montréalaise, originaire de Charlesbourg, s’intéressera encore une fois à la douce jeunesse pour Voler au-dessus de trous (La Pastèque, 17 novembre). Mais, ici, il sera question plutôt d’une enfant qui décide que rien ne viendra se mettre sur son chemin (même pas un père exigeant) pour atteindre ses buts et réaliser ses rêves, que cela soit un cheval, une passion amoureuse ou son désir de dessiner. Malheureusement, savoir ce que l’on veut ne signifie pas nécessairement que cela rend la chose plus facile, et personne n’est à l’abri de soi-même lorsqu’il veut aller trop vite, sans accepter sa propre vulnérabilité. Vu ce que nous connaissons du travail de l’autrice, il y a fort à parier que nous serons touchés et émus par ce récit, qui risque de déborder d’autodérision et de moments malaisants, de ceux qui nous empêchent de bien dormir la nuit lorsque, soudain, ils se rappellent à notre bon souvenir.
Parfois les lacs brûlent,
Geneviève Bigué
Pour son nouveau projet, Geneviève Bigué, artiste multidisciplinaire (animation, illustration et design graphique) originaire de l’Abitibi-Témiscamingue, nous offre sa toute première bande dessinée réalisée dans le cadre d’une résidence d’autrice chez Front Froid. Titrée Parfois les lacs brûlent (Front Froid, 27 septembre), cette bédé nous propose de suivre un groupe d’adolescents qui décident de partir à l’aventure pour confirmer la véracité d’une légende. C’est que, voyez-vous, le lac Kijikone, situé à Rivière-aux-Corbeaux, a pris feu. Et on raconte que tout ce qu’on y plonge en ressort transformé en or. Évidemment, ce pari entre amis aura, semble-t-il, des répercussions insoupçonnées sur le reste de leur vie. Nous sentons déjà, ici, un fond fantastique qui n’est pas sans évoquer le travail et les thèmes de Stephen King, particulièrement sa nouvelle The Body, publiée en 1982 et si bien transposée à l’écran par Rob Reiner en 1986 : la fin de l’innocence à la suite d’un voyage initiatique qui pourrait mal tourner pour tout le monde. Prometteur !
Aya de Yopougon, tome 7,
Marguerite Abouet et Clément Oubrerie
Il en aura fallu du temps, quand même, mais après 12 ans d’attente, les lecteurs de la très belle série Aya de Yopougon (Gallimard) pourront enfin avoir des réponses aux nombreuses questions et révélations laissées en suspens à la fin du sixième tome, paru en 2010. Les deux auteurs originaux, Marguerite Abouet au scénario et Clément Oubrerie au dessin, sont de retour pour nous permettre de retrouver le personnage d’Aya et ses amies qui vivent à Abidjan durant les années 1970. Inspirée de sa jeunesse sans tomber à pieds joints dans l’autobiographie, Abouet a réussi à créer un personnage fascinant qui détonne par son désir qui n’est pas nécessairement de trouver un mari, mais de plutôt poursuivre son éducation afin de conserver son indépendance. Alors, dans ce septième tome (26 octobre), il sera question de lutte pour les droits des étudiants universitaires et d’exil forcé pour aller vivre son homosexualité dans une société que l’on espère un peu plus accueillante que ne l’était la Côte d’Ivoire à cette époque.
La mort de Spirou,
Olivier Schwartz, Sophie Guerrive et Benjamin Abitan
Ce n’est pas la première fois, ni la dernière, probablement, que le mythique personnage de Spirou trépasse pour, finalement, mieux revenir ! C’est ce que nous proposent donc, ici, les plus récents auteurs à avoir reçu les commandes de ce monument du genre en 2021 : Olivier Schwartz au dessin, Sophie Guerrive et Benjamin Abitan au scénario. Dans La mort de Spirou (Dupuis, octobre), c’est sous la surface de la Terre que disparaissent Spirou et Fantasio, tandis qu’ils revisitent la cité sous-marine de Korallion, où ils avaient déjà séjourné quand Franquin était responsable de la série, en 1964. Et, ce n’est pas innocent puisque c’est, semble-t-il, une demande de l’éditeur, Dupuis, qui voulait ainsi se rapprocher du style de l’auteur qui demeure, pour plusieurs, la référence pour ce duo de personnages. Reste à savoir, maintenant, comment Spirou renaîtra parce que, ne soyons pas dupes, lorsque l’on annonce la mort d’un personnage, dans le titre, c’est qu’elle n’a rien de vraiment éternel !