Léa Olivier aux portes des grands

« Je ne m’attendais jamais à ça. » Catherine Girard-Audet, autrice de La vie compliquée de Léa Olivier, est reconnaissante de son succès. Le Devoir l’a jointe par téléphone, à l’occasion du dixième anniversaire de sa série. Un chiffre rond « vertigineux », de son propre aveu.
Il faut dire que le lot de ses réalisations et les multiples avenues qu’a empruntées le projet ont généré leur part d’émotions fortes. En dix ans, l’autrice a publié 23 tomes, traduits en 12 langues et lus dans une vingtaine de pays. À cette épatante production se sont greffées une dizaine de bandes dessinées et une série télévisée, dont la deuxième saison doit débuter le 24 février sur Club Illico : « On a même travaillé — bon, c’est sûr qu’avec la pandémie, ça a pris une autre tournure — sur une adaptation théâtrale. J’avoue que là, à part une adaptation en théâtre de marionnettes, je pense qu’on a fait ce qu’on pouvait avec Léa. »
La femme de lettres, aussi connue pour son ABC des filles, est une femme pleine de promesses et tient à nous rassurer. Elle n’en a pas fini avec son héroïne : « J’ai pas fini de raconter ce que Léa a à vivre au cégep, mais c’est clair pour moi que je ne veux pas la faire vieillir au-delà d’un certain âge. Et après, j’aurai encore plein d’autres histoires d’adolescentes à raconter. Ce ne sera pas ma fin comme autrice. »
Au fil des ans, Léa a vieilli et, à l’orée de l’âge adulte, sa mise en scène pose quelques défis : « Léa est rendue à 17 ans. Moi, dans ma tête, il faut qu’elle vive des choses de 17 ans. Mais parmi mes lectrices, certaines ont 10-11 ans, alors je dois faire attention à ce que je fais vivre à mes personnages. » Un tracas qui ne se posait pas au départ, mais qu’elle ne voit pas comme un frein à la création : « L’important, c’est que je reste fidèle à mon personnage. »
L’écrivaine ne démord d’ailleurs pas de sa volonté initiale et veut inspirer ses lectrices « à apprendre à se respecter. » C’est, en quelque sorte, la transmission de son héritage : « J’ai été élevée par une féministe, je vais toujours être féministe, et oui, j’écris pour les filles, mais je pense qu’on peut éviter d’être cliché. »
Le cégep, une fête sérieuse
Ainsi, dans le plus récent tome de la série — La fiesta —, Léa Olivier fait son entrée au cégep : « Même si mon plan n’était pas établi dès le départ, ça a été rapidement pour moi une évidence que la vie d’une adolescente ne se termine pas au bal des finissants, qui est toujours décevant comme un jour de l’An. Et surtout, je voulais aborder le cégep, parce que c’est une période de transition hyperimportante. »
Marilou, la grande amie de Léa Olivier, y quitte son village pour rejoindre Québec. Pour la femme originaire de L’Ancienne-Lorette, le déracinement de ces jeunes qui gagnent les villes pour poursuivre leurs études ne doit pas être banalisé : « C’est un immense choc. C’est sûr que quelqu’un qui fuit la guerre et qui arrive au Canada, c’est plus traumatisant que quelqu’un qui part de l’Abitibi pour venir à Montréal, mais ça demeure un déracinement qui arrive à plusieurs jeunes Québécois, et je trouve ça important de l’aborder. »
Au secondaire, l’autrice a d’ailleurs quitté sa ville natale pour Montréal, une expérience qui l’a transformée et dont elle voulait témoigner : « Dans le fond, j’ai pris ce que je connaissais. »
Léa Olivier et ses acolytes se frottent aux aléas des relations humaines — la vie est compliquée ou elle n’est pas. Leurs expériences sont plurielles, douloureuses ou heureuses, mais presque toutes sont émancipatrices. La jeunesse y est force de transformation. De quoi inspirer bien des gens.
Les fils de tous les ébats sont retenus par les mailles serrées de l’amitié. Bousculés par les trahisons ou emportés par les émotions, les personnages de La vie compliquée de Léa Olivier ont la chance de compter sur des voix amies. Une solidarité qui ne passe pas inaperçue et qui offre un bel écho, selon Catherine Girard-Audet, aux criants besoins que fait sourdre cette pandémie : « Tant qu’on peut avoir du soutien, tout peut arriver. On pourra se sortir de tout. C’est vrai qu’on est privilégiés, mais on vit tous des journées difficiles et en s’accrochant à notre noyau dur et aux petits plaisirs, on peut passer au travers. »
Trois titres sous le manteau
Première incursion de Suzanne Aubry dans le monde littéraire jeunesse, Le septième étage et demi nous invite à la rencontre de Camille. Elle n’a que treize ans lorsque sa mère, à qui on a diagnostiqué une leucémie, se retrouve au huitième étage de l’hôpital. Tandis que s’amorce la pénible et incertaine lutte des chimiothérapies, Camille bringuebale sa vie en déroute entre la maison de sa tante Loulou et l’école, où ses amitiés s’étiolent dans le tourbillon de sa détresse. Une part d’elle-même est restée bloquée au septième étage et demi de l’hôpital. Le chemin de la réconciliation sera épineux et les épreuves, douloureuses. Un récit de transformation bouleversant qui nous rappelle, en ces temps troubles, la promesse d’embellie qu’offre la résilience.
Daniel Pennac s’est évertué plus d’une fois à décomplexer la lecture, la présentant comme un acte libre et joyeux. Sa rhétorique a emprunté plusieurs routes, et voilà qu’elle prend la forme d’un manifeste ludique, Lire, qui marquera les esprits les plus jeunes. Sa proposition, en vérité, est une réponse aux esprits bornés qui présentent la lecture comme une prescription. Appuyé par le trait fertile du crayon de Lorenzo Terranera, Pennac s’applique à nous rappeler tous ces moments où, sans nous en rendre compte, nous lisons. Lire les pensées, dans les yeux, dans les étoiles : la lecture est partout, et même le plus analphabète d’entre nous n’y échappe pas.
Les histoires de pêche ne se concluent pas toujours par la prise d’un poisson plus grand que l’imagination. Dans le Nina et Milo. Journée de pêche de Marianne Dubuc, l’agréable journée au lac que se promettaient les deux copains prend une tournure inattendue. Emporté par un énorme coup de vent, Milo s’envole. La quête qu’entreprend Nina pour le retrouver relève de l’aventure, et les décisions qu’elle prendra seront dictées par le lecteur. Marianne Dubuc transpose son univers fécond, fait d’attachants personnages animaliers, du parfum des galettes de grand-maman et de décors verdoyants en un livre dont vous êtes le héros. Nina retrouvera-t-elle Milo ? Il n’en tient qu’à vous.