«La cage dorée»: sexe à Stockholm

Superstar du polar suédois, Camilla Läckberg s’est fait connaître avec sa série mettant en vedette Erica Falck et Patrik Hedström. Une romancière et un inspecteur dont la vie de couple se résumait souvent au quotidien familial, tâches ménagères y comprises.
Délaissant ces héros et sortant de Fjällbacka (combien de crimes sordides peuvent se produire dans une bourgade de 859 habitants ?), l’auteure campe La cage dorée à Stockholm, la parsème d’érotisme et nous présente une femme qui s’est forgé une nouvelle identité en intégrant la haute société.

Comme Läckberg nous y a habitués, on y saute entre le présent et le passé. Entre « maintenant », un vague « jadis » et l’année 2001. D’ailleurs, une scène est consacrée au 11-Septembre, que la protagoniste regarde aux côtés de son amant. Voyant les tours jumelles s’effondrer à la télé, elle a une révélation : « J’ai soudain compris le babyboom des années 1940. » (Là, là, vraiment ?) Dans une transition peu délicate, elle passera de « nous regardions le monde brûler » à « L’année suivante devait être la meilleure de ma vie ».
On comprend ici que ce récit se situera quelque part entre l’univers des Real Housewives, de Sex and the City et d’American Psycho (pour le défilé de marques, pas pour la critique sociale). Et qu’entre une séquence juste et touchante, comme celle de la maladie de sa meilleure amie, se glisseront des observations comme, ouf : « L’avenir était si brillant qu’il m’aurait fallu des lunettes de soleil. »
Avec ses allusions au « girl power » et aux « porcs infidèles », Lacage dorée est volontairement « en phase avec son époque ». Pourtant, les femmes y sont souvent jugées. Surtout « les fantoches en Gucci » qui s’inquiètent que leurs vacances soient gâchées par la « présence » de Daech… aux Seychelles. En même temps, l’héroïne peut bien se moquer, elle qui désespère de ne pouvoir « maigrir sans perdre le moral, quand tous les jours des gens accomplissent des exploits ». Comme « aller sur la Lune. Ou vaincre Hitler ».
Subtil comme ça. D’ailleurs, on suit les combines machiavéliques de celle qui rêve de passer « de femme au foyer à p.-d.g » pour écraser son goujat d’ex-mari au fil de remarques telles que : « Elle n’avait rien à cacher. En tout cas, au sujet de ses finances. » (Dans la tête du lecteur, un rire machiavélique se déclenche : « mouahahahaha »).
Notons aussi que les solutions de résolution fastoches du polar ne sont pas évitées. Ah ! Le truc de l’ex qui change le mot de passe de sa boîte courriel, mais PAS celui de son ordi (rappel : prénom de l’enfant + année de naissance, c’est aussi peu efficace que Bonjour123). Jusqu’à cette finale faite d’un plan archicomplexe à la Gone Girl de Gillian Flynn (sauf qu’il semble peu nécessaire puisqu’une seule preuve incriminante trouvée sur l’ordi susmentionné aurait suffi à dynamiter la réputation du vilain ex le temps de dire Bonjour123).
Reste que, malgré les invraisemblances et les évidences (la marque de cosmétiques que lance l’héroïne pour se venger s’appelle… REVENGE), c’est rythmé, divertissant et curieusement réjouissant.
Au final, c’est peut-être l’auteure qui l’a, sa « REVENGE ».