«Que fais-tu là?»: une image, mille mots

Par esprit de jeu, par amitié ou bien parce qu’il était à court d’idées, Jean-Paul Beaumier s’est inspiré de photographies prises par Anne-Marie Guérineau (fondatrice du magazine littéraire Nuit Blanche, qu’elle a dirigé de 1990 à 2011), surtout des portraits, pour créer les 26 nouvelles que l’on retrouve dans Que fais-tu là ?, son septième recueil depuis 1988.

L’auteur de Fais pas cette tête (Druide, 2014) y partage, comme à son habitude, des histoires teintées de douceur et d’humanité, qui se déclinent le plus souvent sous la forme de la confession — et dans une langue sans relief.
Ici, une vieille femme raconte l’AVC subi par sa soeur, tout en nous rappelant que « le bacon n’est pas recommandé pour des gens de notre âge, alors que le foie de veau l’est à cause du fer » (« On a une bonne génétique ).
Plus loin, la photographie d’une femme enceinte lui inspire un monologue dans lequel une femme enceinte remplit un carnet en s’adressant à l’enfant encore à naître (« L’origine du monde »).
À la mort de sa mère, une femme évoque sa relation tendue avec sa propre soeur à partir d’une photographie aperçue dans l’appartement déserté (« Les bottes» ).
Banalité
Des histoires familiales un peu jaunies comme le sont de vieilles photos tirées d’une enveloppe oubliée. Des frustrations, de la jalousie. Du chagrin, des espoirs nourris ou déçus.
Malgré eux, les personnages au centre des histoires de Jean-Paul Beaumier semblent se caractériser par leur banalité. Mais pas une banalité tragique — la plus intéressante en fiction —, l’autre, qui est à la fois plus commune et plus ordinaire.
Si le procédé est original, à la fois moteur et contrainte, il se dégage de celui-ci une sorte de fadeur sans surprise et une impression de facilité. Un ronronnement prévisible et constant dont le lecteur, au fond, a parfois du mal à mesurer la nécessité.