«Être du monde»: le cargo de la délivrance

L’un des attraits de ce récit réside dans les séquences décrivant la vie à bord d’un cargo qui sillonne l’Atlantique, sur lequel l’auteure s’est embarquée pour livrer cette histoire dans le but explicite d’en faire une thérapie individuelle, et son deuil.
Photo: Druide L’un des attraits de ce récit réside dans les séquences décrivant la vie à bord d’un cargo qui sillonne l’Atlantique, sur lequel l’auteure s’est embarquée pour livrer cette histoire dans le but explicite d’en faire une thérapie individuelle, et son deuil.

Elle affiche une trentaine de romans à son actif, mais Maryse Rouy s’est concentrée cette fois sur un récit qui raconte la maladie de sa mère, atteinte de la sclérose latérale amyotrophique, et les longs mois à l’accompagner dans sa dégénérescence.

Période durant laquelle les étapes de la douleur se succèdent, impitoyables, d’un côté comme de l’autre, autant pour le coeur que pour le corps.

D’abord devant le refus de vieillir et la peur de la mort comme bien des aînés le vivent, puis devant les décisions déchirantes à prendre lorsqu’on est confronté à la perte graduelle d’autonomie et de lucidité d’un être cher. À commencer par la nécessité de l’arracher à son milieu de vie, souvent installé depuis des décennies, et de lui dénicher une place qui lui convient en maison de retraite.

Une période de proche aidance, aussi, où chaque instant est accaparé par le stress, l’inquiétude de voir sa mère chuter, s’étouffer ou, dans ce cas-ci, de trouver les moyens pour comprendre cette personne qui a perdu petit à petit l’usage de la parole. Tout cela sur fond de culpabilité quand surviennent les très rares phases de « liberté » des aidants, accordés par quelque petit plaisir de l’existence.

Les lecteurs qui ont vécu ce genre de situations avec un proche trouveront dans le livre de Maryse Rouy un calque plus ou moins fidèle de leur propre expérience. Les autres y verront assurément matière à compassion.

La vie à bord

Mais l’un des attraits de ce récit réside également dans les séquences décrivant la vie à bord d’un cargo qui sillonne l’Atlantique, sur lequel l’auteure s’est embarquée pour livrer cette histoire dans le but explicite d’en faire une thérapie individuelle, et son deuil. Sa cabine deviendra ainsi un repaire d’écriture, une solitude ponctuée de moments passés avec l’équipage et les passagers.

Même si Être du monde se lit un peu comme un roman, on ne peut s’empêcher de penser : vivement le retour de Maryse Rouy à la fiction.

Être du monde

★★★

Maryse Rouy, Druide, Montréal, 2019, 190 pages

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