Le retour à la terre de Gabrielle Filteau-Chiba

«Encabanée», premier livre de Gabrielle Filteau-Chiba, prend des airs de manifeste à coups de discours instantanés et de rapides revendications écologistes.
Photo: Jean-François Papillon «Encabanée», premier livre de Gabrielle Filteau-Chiba, prend des airs de manifeste à coups de discours instantanés et de rapides revendications écologistes.

Durant une semaine en plein coeur de l’hiver, installée sur le bord d’une rivière dans le Kamouraska, une jeune femme tient son journal, nourri d’un peu de réflexions, de listes hétéroclites et d’illustrations. Montréalaise qui a récemment troqué son appartement en ville contre un bout de terre et la cabane qui s’y trouve, Anouk y affronte la solitude et le froid, armée de son « dégoût pour la société », d’un peu d’idéalisme naïf et d’un fort désir de recommencement.

« J’ai quitté Montréal parce que je n’en pouvais plus de ces cadrans qui nous réveillent à l’aube, et du pas militaire des imperméables qui défilent dans les rues, cohortes de corneilles macabres avec leur mine d’enterrement, vers un travail qui pellette la neige par en avant. »

Tout en essayant de survivre à l’hiver, elle cherchera à construire au fond des bois sa propre définition du « féminisme rural » et à trouver sa raison d’être. « Je réaliserai mon rêve de toujours : vivre de ma plume au fond des bois. »

Ne lui restera plus qu’à apprivoiser le manque de sexe. La solution à ce problème va se présenter sous la forme d’un terroriste écologiste recherché après avoir fait dérailler un train qui viendra trouver refuge brièvement dans sa cabane.

C’est le territoire où nous entraîne Encabanée, premier livre de Gabrielle Filteau-Chiba, qui prend des airs de manifeste à coups de discours instantanés et de rapides revendications écologistes. Un roman court et brouillon à l’écriture lyrique et surchargée, dans lequel la narratrice s’adresse à tout le monde et à sa mère.

Entre la fumée de Marie-Jeanne et la lecture des poètes québécois se construit ainsi un récit en pointillé qui tourne en rond et semble avancer à coups d’associations d’idées et de répétitions — un défaut qu’on ne devrait jamais retrouver dans un roman de moins de cent pages. Une sorte de petit fouillis, en somme, entre quatre murs.

Extrait de «Encabanée»

« Bonjour les casseroles en fonte, les semis, les cercles de femmes fières de leurs récoltes et débordantes de vitalité, les enfants nés dans les draps où ils ont été conçus et rêvés, les conserves multicolores sur des tablettes en bois de grange, les soirées de mimes arrosées de cidre de pomme, les longues marches en forêt pour cueillir les remèdes. Mais surtout, j’aimerais éprouver ce sentiment d’enracinement quand on travaille le sol d’un jardin et le vivre comme un effort de guerre pour protéger la Terre. »

 

Encabanée

★★

Gabrielle Filteau-Chiba, XYZ, Montréal, 2018, 94 pages



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