Sport - Coup de circuit
C’est vrai, quand on y pense, que le langage est assez imagé. Il y a des coussins, un joueur peut frapper un carrousel, les sentiers peuvent être déserts et il arrive qu’une chandelle soit frappée dans le champ intérieur.
Puis, il y a dans le baseball un rythme mystérieux. Dans l’immense majorité des sports, on court, on s’agite, on se plaque, on tente d’atteindre le plus vite possible un but, un panier. Dans le baseball, il y a des espaces pour rêvasser, des lenteurs, des attentes où il semble ne rien se passer, des balles qui prennent des directions inusitées et qui semblent quelquefois flotter dans les airs, une géométrie du terrain qui ne correspond à rien de connu, une sorte de jeu cabalistique autour du chiffre trois (trois buts, trois prises, trois fois trois manches, et ainsi de suite… ).Pour le journaliste Michel C. Auger, «au baseball on est toujours hors du temps». Pour l’auteur et chroniqueur Christian Tétreault, une balle et un gant de baseball, ce sont des instruments de communication entre un père et son fils. Pour l’écrivain David Homel, c’est le sport le plus chargé de rêves d’enfance.
Comme on peut le voir, le baseball peut susciter un certain lyrisme. Ce qui est bien avec ce livre, c’est cette multiplicité de points de vue qui plongent souvent au coeur de l’enfance. Pour la vingtaine d’écrivains, de journalistes ou de personnalités qui ont collaboré au recueil, leur texte se nourrit d’abord des odeurs d’herbe coupée et du cuir des gants, de la sensation de la brise d’été et de la poussière du marbre... Des textes empreints de la nostalgie de l’enfance, mais d’une nostalgie joyeuse et assumée.
Les Éditions des 400 Coups poursuivent avec Une vue du champ gauche un travail amorcé en 2000 avec la publication d’Une enfance bleu-blanc-rouge, collection de textes réunis par l’auteur Marc Robitaille. Il s’agissait à l’époque de réunir des souvenirs d’enfance autour du hockey, dans un album à l’iconographie exceptionnelle. En 2002, l’éditeur récidivait avec Une enfance noir et blanc, où Raymond Plante avait alors recueilli des souvenirs d’enfance de télévision.
Cette fois-ci, Marc Robitaille reprend le collier pour regrouper des textes de gens aussi différents que Aislin, Serge Bouchard, Jean Dion, Christiane Duchesne, David Homel, Mario Jean, Marcel Sabourin et d’autres, autour de la passion du baseball. Ce n’est ni une histoire du baseball ni une histoire des Expos de Montréal. Il s’agit plutôt d’une suite de parcours personnels où s’entrecroisent souvenirs d’enfance, rites de passage d’adolescence et passions d’adulte pour la courbe parfaite d’un lancer!
Les 400 Coups ont effectué un travail d’édition vraiment remarquable, avec une profusion de photos (le parc Jarry des débuts, le vieux stade Delorimier, l’incroyable barbe de Bill Lee en 1979… ) et de reproductions de cartes de baseball, d’anciennes publicités et autres curiosités iconographiques.