Littérature québécoise - Un Québécois dans la guerre de Sécession américaine
Paru en feuilleton dans La Patrie en 1884, avant d'être édité en volume la même année, Un revenant, de Rémi Tremblay, est un parfait exemple de cette «petite littérature» qui poussait alors en pleine lumière. Le temps seul lui a fait de l'ombre - aidé il est vrai de quelques critiques ultramontains qui condamnaient sans réserve le roman. Grâce à l'effort de quelques éditeurs passionnés et convaincus, les lecteurs d'aujourd'hui peuvent renouer avec tout un pan de notre histoire littéraire.
Le Narrateur du Revenant: épisode de la guerre de Sécession y raconte les «aventures et mésaventures» d'un jeune héros durant ses dix-huit mois de service au sein du quatorzième régiment d'infanterie régulière des États-Unis, au moment de la guerre de Sécession (1861-1865). Une oeuvre aux accents balzaciens: un jeune homme amoureux se voit refuser la main de celle qu'il aime, il quitte la campagne pour Montréal, se fait voler tout son argent, puis préfère fuir et s'enrôler dans l'armée américaine. Mais l'histoire d'amour est accessoire. L'intérêt est ailleurs: il s'agit d'un témoignage de première main, l'auteur ayant lui-même participé à la guerre de Sécession américaine.Né en 1847 à Saint-Barnabé, fils d'un patriote convaincu, Rémi Tremblay quitte sa famille et s'engage à 16 ans dans l'armée américaine. Il ne reviendra au pays qu'en 1865, presque deux ans plus tard, dont six longs mois dans la prison Libby de Richmond en Virginie. Rémi Tremblay mourra en 1926, après 78 ans d'une carrière bien remplie de journaliste batailleur et de polémiste, ponctuée de nombreux séjours outre-mer. L'homme s'était donné comme devise: «Hors la loi divine qui s'impose à chacun, j'abhorre tous les jougs et n'en subis aucun.» Au-delà des pérégrinations américaines du héros, en grande partie autobiographiques, l'oeuvre prend une couleur sociologique et historique non négligeable à travers le portrait des moeurs politiques pas très propres de l'époque — où hommes d'affaires, journalistes et politiciens mangeaient souvent dans la même main. En plus de constituer une formidable chronique du quotidien canadien-français dans la seconde moitié du XIXe siècle.
Les introuvables
Fondées en 1990 à Québec, les Éditions de la Huit se sont donné pour objectif de faire connaître de nouveaux écrivains, mais également de publier des ouvrages devenus introuvables ou difficilement accessibles. Cherchant à mettre en valeur «la littérature canadienne du siècle dernier et tout particulièrement les écrivains de l'École patriotique de Québec de 1860, dont les oeuvres restent encore mal connues parce que rarement rééditées», leur collection «Anciens» a ainsi déjà accueilli un Nicolas Perrot ou les coureurs des bois sous la domination française, de Boucher de Boucherville; La Fille du brigand de Pamphile Le May, ou un Sabre et scalpel de Napoléon Legendre (1873) à la manière de Ponson du Terrail.