Au-delà de nos conceptions arriérées de l’économie et du progrès

« La nature est notre demeure. » Ce beau mot si simple du généticien vancouvérois David Suzuki et d’Ian Hanington, rédacteur en chef de la fondation écologiste qui porte le nom du scientifique, révèle que leur livre Halte à la surchauffe ! est non seulement un cri d’alarme, mais un persuasif essai de vulgarisation sur le changement climatique. Il invite à repenser l’énergie en mettant en cause « nos conceptions arriérées de l’économie et du progrès ».
Dans une préface qu’il signe seul, Suzuki, aujourd’hui âgé de 81 ans, rappelle qu’il a appris l’existence du réchauffement planétaire vers 1975. Les climatologues soulignaient que l’accumulation de gaz à effet de serre, comme le dioxyde de carbone ou le méthane, qui empêchent la chaleur de quitter l’atmosphère, n’avait jamais augmenté à un niveau semblable. Ils considéraient que l’activité humaine polluante était responsable de ce bouleversement climatique.
Les deux auteurs signalent que, même si l’intensité du phénomène est « beaucoup plus importante et rapide au XXe siècle que dans les quatre siècles précédents du moins », la découverte de l’effet de serre remonte en 1824. Cette année-là, le mathématicien et physicien français Joseph Fourier constata que l’atmosphère, un peu comme une boîte de verre, retient une partie de la chaleur solaire.
Pour remédier à l’accentuation de cet effet de serre, l’Accord de Paris en 2015, premier traité international pour faire échec au changement climatique, oblige les États industrialisés à éviter les combustibles fossiles, comme le pétrole, pour accomplir une transition vers des énergies renouvelables d’ici 2050. Bien que le président américain, Donald Trump, climatosceptique résolu, entende renier la ratification du traité par son prédécesseur Barack Obama, un espoir subsiste.
Bien sûr outrés par l’intention des États-Unis, le plus gros émetteur de gaz à effet de serre après la Chine, Suzuki et Hanington se consolent en observant que, dans ce pays, « de nombreux États et villes, ainsi que de grandes sociétés, sont déterminés » à appliquer l’Accord de Paris. Autre signe encourageant : de 2005 à 2014, dans l’Union européenne, la part des énergies renouvelables, tirées par exemple du vent ou du soleil, est passée de 8,7 % à 15,3 %.
La recherche constante de l’équilibre donne vie à l’analyse de Suzuki et de Hanington. S’ils rejettent le vieux capitalisme qui fait des combustibles fossiles un absolu, ils saluent la naissance d’une nouvelle économie axée sur l’exploitation des énergies renouvelables. S’ils déprécient la combustion des carburants, ils affirment que la préservation des océans et des forêts, pour eux « puits de carbone naturels », est nécessaire à la survie de l’humanité.
Se trouve ainsi banni l’écologisme tout en noir qui ne reflète pas la riche complexité de la nature.