Mon univers, Marc Chagall

Ceci explique sans doute cela : en 1887, rue Pisbovatik, à Vitebsk, en Biélorussie, l’artiste Marc Chagall est né… mort. « Je ne voulais pas être parmi les vivants. Je ressemblais à une vessie blafarde qui ne voulait pas vivre dans le monde. […] J’aurais tellement voulu que les psychologues n’en tirent pas un jugement défavorable à mon sujet… Ayez pitié ! » écrit-il dans Mon univers, autobiographie publiée en épisodes et en yiddish dans la revue littéraire new-yorkaise Di Tsukunft (Le Futur). C’était en 1925. En marge de l’exposition Chagall, couleur et musique, qui prend l’affiche aujourd’hui au Musée des beaux-arts de Montréal (MBAM), la chose se rappelle au bon souvenir du présent dans une nouvelle traduction en français. Dans la langue gondolée des gens simples ou des identités métissées, l’artiste, figure du chromatisme onirique, s’y dévoile sans compromis, y raconte ses désirs d’art et son ascension dans le domaine de l’art pictural porté par l’effervescence d’une époque « sur le point de vivre une catastrophe ». Les femmes, les couleurs, les doutes, Paris, Berlin, la Russie qui s’enflamme ou Picasso qui met fin au cubisme, en 16 chapitres Chagall dessine ce journal d’« une vie » — titre donné à la première traduction réalisée par sa femme Bella en 1931 — dont les rêves et l’imagination ont façonné un étonnant univers.