L’UNEQ réclame une réglementation sur le prix des livres

L’Union des écrivaines et écrivains du Québec (UNEQ) se prononce officiellement en faveur d’une réglementation du prix de vente des livres neufs pour assurer une saine « bibliodiversité ». L’organisme ouvre le bal des prises de position en dévoilant les grandes lignes du mémoire qu’il présentera au jour un de la commission parlementaire, le 19 août.

 

« Une politique de réglementation du prix du livre s’impose de façon urgente afin d’assurer la survie du réseau des librairies à travers le Québec qui se trouve fragilisé notamment par un recul de ses ventes », a déclaré la présidente de l’UNEQ, Danièle Simpson, par communiqué, jeudi.

 

L’UNEQ craint que d’autres fermetures de librairies réduisent l’accès au livre, car celles-ci assurent une offre de titres variés allant bien au-delà des oeuvres d’auteurs à succès auxquelles se cantonnent généralement les grandes surfaces. Son mémoire cite l’exemple d’un détaillant de grande surface tenant seulement 300 titres, soit 1 % de l’offre globale de livres neufs, québécois et étrangers, dans une année. Et ses rabais appliqués vont parfois jusqu’à 50 %.

 

« Hors d’une librairie, quelle place y a-t-il donc pour la poésie, l’essai de réflexion, le roman d’exploration ? », demande l’UNEQ. Or, la part de marché des librairies indépendantes est passée de 35 % en 2006 à 28 % en 2010, selon l’Observatoire de la culture et des communications.

 

Dans ce contexte, l’association recommande de limiter les rabais à 10 % sur les prix de vente de livres neufs, et ce, pour une durée de neuf mois. Elle propose d’appliquer la même règle aux nouveautés en version numérique. En 2011, plus de 6564 nouveautés ont été publiées au Québec. L’UNEQ rappelle aussi l’urgence d’agir en exhortant le gouvernement à adopter les dispositions législatives « sans plus attendre ».

 

La position de l’UNEQ découle de celle de la Table de concertation du milieu du livre formée en 2002 avec six autres grandes associations du milieu. Déjà en août dernier, la Table réclamait une telle réglementation de la part du gouvernement, en lançant la campagne « Nos livres à juste prix ». D’autres acteurs estiment qu’une telle réglementation aura un impact négatif sur la vente de livres.

 

Liste d’invités révisée

 

En juin, le milieu du livre déplorait la grande place accordée aux géants de l’industrie tels Costco, Amazon, Wal-Mart dans le déroulement prévu des auditions de la commission, par rapport aux professionnels de la chaîne du livre d’ici. Le ministère de la Culture avait alors promis une rencontre et rappelé que la liste d’« invités » était sujette à changement.

 

L’Association nationale des éditeurs de livres confirme avoir accueilli des membres du cabinet du ministre Maka Kotto et se réjouit de la liste modifiée des invités à la commission.

 

« C’est beaucoup plus représentatif de la réalité du milieu », note Richard Prieur, directeur général de l’ANEL, constatant avec Le Devoir que les géants de l’industrie ne figurent plus dans la liste actuelle. Ils seront peut-être représentés par le Conseil canadien du commerce de détail. »

 

Toutefois, la liste n’est pas complète. « Il manque trois séances d’auditions à mettre à l’horaire du mois de septembre, pourune durée totale d’environ 35 heures », indique au Devoir l’attaché du ministre Kotto, Marc-André De Blois.

 

***

La Table est mise

La Table de concertation interprofessionnelle du milieu du livre emboîtait le pas à l’UNEQ, en fin de journée jeudi, en rappelant que le modèle de réglementation proposé - limiter les rabais sur le prix des livres à 10 % pendant les neuf premiers mois de leur publication - imposerait un prix plancher aux nouveautés plutôt qu’un prix unique. « Nous voulons favoriser la concurrence dans le secteur de la vente au détail des livres et non pas la limiter. Pour ce faire, il faut éviter la prise de contrôle du secteur par une poignée d’entreprises qui utilisent les guerres de prix pour tuer la concurrence », a dit Pascal Chamaillard, président de l’Association des distributeurs exclusifs de livres en langue française (ADELF) dans un communiqué. Le regroupement signale que la moitié des pays de l’OCDE réglemente le prix des livres pour protéger leur culture et leur industrie nationale. Il fonde beaucoup d’espoirs sur les travaux de la commission parlementaire qui commencent lundi, estimant qu’ils pourraient forger en partie l’avenir du livre au Québec.

À voir en vidéo