Toute une année en territoire manga à la Grande Bibliothèque
Beau temps pour les yeux démesurés, les créatures espiègles vivant dans des camphriers, les robots justiciers et les balades dans le vieux Tokyo. Jusqu'en janvier 2013, la Grande Bibliothèque a décidé en effet d'ouvrir ses portes et ses activités culturelles à la bande dessinée japonaise. L'Année Manga — c'est son nom — va prendre son envol le 20 septembre, ont annoncé hier les représentants de l'institution, avec une vaste exposition sur ce phénomène culturel. Pour commencer.
«L'univers de la bande dessinée japonaise est d'une richesse insoupçonnée et c'est un grand honneur pour nous d'en explorer tous les contours», a résumé Guy Berthiaume, directeur de Bibliothèque et Archives nationales du Québec (BAnQ) par voie de communiqué.Le crayon est posé sur la feuille. Il va aussi donner forme dans les prochains jours et pour un an à l'exposition Manga - L'art du mouvement pilotée par l'historienne de la bande dessinée Mira Falardeau. Le grand Jirô Taniguchi (La Montagne magique, Les Années douces, Quartier lointain) va y être à l'honneur, tout comme Osamu Tesuka — le père d'Astro —, Takeshi Obata (Death Note) et Natsuki Takaya — la dessinatrice derrière Accords parfaits. Entre autres.
Ailleurs dans la programmation, l'année de la Grande Bibliothèque en territoire manga va passer au crible la mécanique de ce genre littéraire dans le cadre d'une exposition pour la jeunesse intitulée Raconte-moi un manga. Il va y avoir des planches, des techniques mises en relief, mais également des produits dérivés pour renouer avec Astro, Mini-Fée, Albator — oui, le pirate solitaire de l'espace qui entretient des rapports troubles avec une femme robot asexuée —, Candy — celle qui a l'oeil qui tremble sous l'émotion — et Goldorak, le cauchemar quotidien de Minos, d'Hidargos et des Golgoths.
Le mariage entre l'institution provinciale et le monde des gros yeux dessinés, qui depuis les années 1960 s'est répandu partout sur la planète, va aussi se consommer par l'entremise d'ateliers de création, de rencontres avec des maîtres du genre — une est prévue avec le réalisateur de film d'animation Keiichi Hara — ou encore d'une table ronde sur la place des mangas au Québec.
Avec des histoires à épisodes, des personnages en minijupes, des créatures de l'espace, des lutins malicieux, des cases exprimant sans cesse le mouvement, les très japonais mangas se sont taillés une place importante dans l'univers de la bande dessinée francophone, poussés entre autres par les maisons Glénat, Kana et Pika, tout comme par les enfants des baby-boomers qui s'y abreuvent depuis tout jeune. L'an dernier, ce genre littéraire a représenté 40 % des nouveautés du neuvième art en français, selon les données de l'Association des critiques et journalistes de bande dessinée (ACBD). En 2010, ce marché a été dominé par la série Naruto de Masashi Kishimoto dont les épisodes 46 à 51 ont été vendus à plus de 250 000 exemplaires chacun, soit 100 000 de plus que le dernier Titeuf de Zep, les Bidochons de Binet ou les Tuniques bleues de Lambil et Cauvin.