Littérature Étrangère - Tout nouveau, tout beau

Des nouveautés en traduction, l'automne 2009 nous en apportera à la pelle. À commencer par le premier roman de David Foster Wallace, écrivain américain mort en 2008 à l'âge de 46 ans, que publie Au Diable Vauvert. Le Los Angeles Times plaçait bien haut la barre en 1996: «Une métafiction comme on n'en avait pas vu depuis les plus grands jours de John Barth, Donald Barthelme, William Gass et William Gaddis. Ah, oui, et Thomas Pynchon.» Et parlant de William H. Gass, celui-ci abordera dans Sonate cartésienne (Le Cherche-midi) quelques-uns de ses thèmes favoris: l'isolement géographique ou conjugal, l'obsession, le mal et le fascisme.
Chez Belfond: un nouveau titre de Colum McCann, Et que le vaste monde poursuive sa course folle, un roman qui restitue l'effervescence artistique et politique qui régnait à New York dans les années 1970. Aussi, La Double Vie d'Irina, de l'Américaine Lionel Shriver (Il faut qu'on parle de Kevin), La Chute de John Stone, de Iain Pears. L.A. Story, de James Frey (Flammarion), et Les Enfants de Las Vegas de Charles Bock (L'Olivier), qui a connu un succès critique et public retentissant aux États-Unis à sa sortie l'an dernier, semblent sortir du lot.À noter chez Gallimard: Le Grand Quoi du New-Yorkais Dave Eggers et Exit le fantôme de Philip Roth, où l'écrivain américain de 76 ans fait reprendre du service à son alter ego, Nathan Zuckerman. Netherland, de Joseph O'Neil, parabole sur la fin du «rêve américain» et roman d'amour aux résonances poignantes, devrait aussi retenir l'attention (L'Olivier). Chez Actes Sud, Carpentarie, de l'écrivaine et activiste aborigène Alexis Wright, est quant à lui précédé d'une rumeur favorable. «Empli d'un souffle magique» aux yeux de son éditeur, ce roman «monumental» a semble-t-il créé l'événement à sa parution en Australie, en 2006.
Si loin, si proches
Et si nous jetons, un peu plus près de nous, un oeil du côté de l'autre solitude, on nous promet cet automne des nouvelles d'Alice Munro, Du côté de Castle Rock (Boréal et L'Olivier), Les Troutman volants de Miriam Toews, dont le roman Drôle de tendresse (Boréal, 2005) avait remporté le Prix du Gouverneur général. Aussi: des nouvelles à saveur autobiographique de Margaret Atwood, Le Fiasco du Labrador (Robert Laffont).
Les Allusifs rééditent Voyageurs en souffrance de Mavis Gallant et publient un roman encore inédit en français de l'écrivaine, Rencontres fortui-tes, paru pour la première fois en 1970, l'histoire d'une jeune Canadienne excentrique errant dans Paris au fil de rencontres de hasard. Toujours aux Allusifs, avec Entre espoir et nostalgie, Tecia Werbowski s'intéresse une fois encore à Prague et interroge le lourd héritage du communisme.
L'écrivain anglo-montréalais d'origine libanaise Rawi Hage, dont le Parfum de poussière avait remporté le Prix des libraires du Québec en 2008, revient pour sa part avec Le Cafard (Cockroach), publié à Toronto l'an dernier, une dérive urbaine qui aborde l'expérience «souterraine» — pauvreté, solitude, amertume et violence contenue — d'un immigrant libanais à Montréal. Chez Alto. À surveiller: Coeurs Molotov, traduction de Bottle Rocket Hearts, premier roman de Zoe Whittall, née en 1976 à Durham-Sud, dans les Cantons-de-l'Est (Québec Amérique). Aperçu: une anglophone du West Island tombe amoureuse d'une artiste souverainiste plus âgée qu'elle, au coeur des débats entourant le référendum de 1995. Choisi parmi les meilleurs livres de l'année 2007 par The Globe and Mail et le magazine Quill & Quire.
Europe, etc.
L'auteur portugais nobélisé José Saramago publie Le Voyage de l'éléphant (Seuil), tandis que l'autre géant des lettres lusophones au Portugal, Antonio Lobo Antunes, nous revient avec Je ne t'ai pas vu hier à Babylone (Bourgois), où se superposent les monologues intérieurs de plusieurs personnages qui ont tous connu un ancien agent de la police politique de Salazar. Chez Viviane Hamy, deux courts récits de Gonçalo M. Tavares, auteur né en 1970 et considéré par la critique comme l'un des plus grands noms de la littérature portugaise contemporaine, attirent l'attention: Monsieur Calvino et la promenade, ainsi que Monsieur Kraus et la politique.
Très attendu après l'excellent L'Ombre du vent, Carlos Ruiz Zafón revient avec Le Jeu de l'ange (Robert Laffont), où dans la turbulente Barcelone des années 1920 un jeune écrivain hanté par un amour impossible reçoit l'offre d'un mystérieux éditeur: écrire un livre comme il n'en a jamais existé en échange d'une petite fortune.
Alberto Manguel, écrivain au lourd passé d'essayiste (Une histoire de la lecture, Dictionnaire des lieux imaginaires), aborde cette fois le roman avec Tous les hommes sont menteurs, une fiction bibliophile. Aussi traduits de l'espagnol: un thriller «futuriste» de José Carlos Somoza, La Clé de l'abîme (Actes Sud). Une énième incursion dans l'Espagne franquiste — sujet inépuisable — avec Le Sommeil du caïman d'Antonio Soler (Albin Michel). L'Instant même nous promet des Nouvelles du Chili, une anthologie traduite et présentée par Louis Jolicoeur. Aussi: Le Cercle des douze, de Pablo de Santis (Métailié), prix Planeta du roman ibéro-américain 2007.
Sans oublier Une fois deux, de l'Allemande Iris Hanika, «une simple histoire d'amour» racontée de façon particulièrement originale (Les Allusifs). Une nouveauté à la manière feutrée du Danois Jens-Christian Grondahl, Les Mains rouges (Gallimard). Quelques Russes? Un «instantané» de la Russie contemporaine par Natalia Klioutchareva (Un train nommé Russie, Actes Sud), un portrait de la jeunesse russe révoltée de Zakhar Prilépine (San'kja, Actes Sud). Mais également des écrits serbes, avec Ma femme, de David Albahari, ainsi que Baisespoir, de Vladan Matijevic (Les Allusifs).
De plus loin encore, le Chinois Mo Yan signe La Dure Loi du karma (Seuil), tandis qu'Elias Khoury nous tisse un roman de destins croisés entre le Liban et la Colombie avec Le Coffre des secrets (Actes Sud). Et encore: L'Aile tatouée (Denoël), du Roumain Mircea Cartarescu. L'éditeur: «Premier grand roman sur la révolution roumaine de 1989, L'Aile tatouée est une oeuvre monstre, incandescente, merveilleusement servie par la richesse de la langue et la maîtrise du style de Mircea Cartarescu.» À voir.
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Collaborateur du Devoir