Prestige du catalogue

Vingt ans après Peintres juifs et modernité, Montréal 1930-1945, voici sa... redite? Revoici le coup double expo-livre de 1987, puisque Peintres juifs de Montréal, témoins de leur époque 1930-1948 est autant à voir (au Musée national des beaux-arts du Québec) qu'à lire. L'auteure en est toujours Esther Trépanier, professeure d'histoire de l'art à l'UQAM. Différence notable, au-delà des titres: le document d'aujourd'hui n'est pas un catalogue d'exposition. Ce serait davantage l'inverse, l'expo accompagnant cette fois la publication.
Spontanément, une question surgit. Après combien de temps une recherche devient-elle désuète? Doit-on s'étonner que seulement 21 ans nous séparent de l'expo présentée au Centre Saidye-Bronfman? Bien sûr, ça n'a rien à voir avec le temps si une nouvelle approche, une nouvelle lumière, vient bousculer la théorie de départ. Ce qui n'est pas le cas ici, Esther Trépanier reconnaissant, dans son «Introduction à la nouvelle édition», avoir voulu «préserver l'essentiel de la réflexion théorique», qui lui paraît «toujours pertinente».La réflexion veut que la communauté juive ait occupé l'avant-scène artistique de Montréal dans les années 1930. Une époque que l'histoire de l'art semble qualifier de creuse, après les premiers modernistes québécois, toujours pris dans le paysage, et avant l'éclosion du mouvement automatiste. Ce serait donc eux, Louis Muhlstock, Jack Beder et Eric Goldberg, pour ne nommer que les figures majeures, qui auraient entretenu notre modernité.
Le travail d'Esther Trépanier a été d'un grand apport, novateur. Sortant de l'oubli les Ernst Neumann et autres Harry Mayerovitch. Jetant les bases d'analyse de cette peinture marquée d'urbanité. L'étude a peut-être depuis été étoffée, particulièrement dans le cas des biographies, mais elle demeure sensiblement la même.
Alors, redite? Certes, mais qui se défend du fait que la publication de 1987 a mal vieilli. Faute de moyens et de ressources, les oeuvres, à quelques exceptions près, n'avaient pas été reproduites en couleurs. Rééditer l'ouvrage visait donc aussi son amélioration. Peintres juifs de Montréal... n'est peut-être pas un catalogue, mais il en a tout le prestige.
Collaborateur du Devoir
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Peintres juifs de Montréal. témoins de leur époque 1930-1948
Esther Trépanier
Les Éditions de l'Homme
Montréal, 2008, 288 pages