Pourquoi ne pas installer des parcs éoliens près des barrages?

Ce texte est tiré du Courrier de la planète. Pour vous abonner, cliquez ici.
Ces prochaines années, la filière de l’énergie éolienne est vouée à connaître un important développement au Québec. Martin Roth, l’un de nos lecteurs, s’enquiert de la possibilité de construire des fermes de vent près des barrages hydroélectriques existants. « Je vois des avantages, écrit-il : connexion facile au réseau, modulation de l’offre et de la demande avec le barrage, installation loin des zones habitées. »
L’idée est loin d’être farfelue, indique Bernard Saulnier, un ingénieur retraité d’Hydro-Québec qui a consacré sa carrière à l’énergie éolienne.
Il existe effectivement des « synergies naturelles » entre les éoliennes et les réservoirs hydroélectriques, explique M. Saulnier. Quand le vent souffle, les grandes hélices génèrent de l’électricité. Quand le vent se calme, on peut ouvrir les vannes, et les turbines hydroélectriques prennent le relais. Ainsi, peu importe la météo, on génère du courant.
Évidemment, ce principe de complémentarité vaut où que soient situées les centrales dans le réseau. Toutefois, si les deux types d’équipement partagent le même site, ils peuvent acheminer leur énergie vers les centres de consommation grâce aux mêmes lignes de transport. On a donc besoin de moins de câbles et de moins de pylônes.
D’ici les prochaines années, Hydro-Québec rénovera ses vieilles centrales hydroélectriques pour dégager 2000 mégawatts de puissance additionnelle (environ 5 % de sa capacité totale). Tant qu’à effectuer des travaux dans les complexes hydroélectriques, « ils pourraient jumeler ça avec de l’éolien », pense M. Saulnier.
Au chapitre de l’acceptabilité sociale, on peut imaginer que l’ajout d’hélices dans des paysages déjà dénaturés par d’immenses ouvrages de béton ne susciterait pas trop de controverses. Il faudrait évidemment confirmer la chose avec les communautés autochtones locales, souligne M. Saulnier. L’entente entre Hydro-Québec et les Cris fait justement l’objet de discussions actuellement.
Ailleurs dans le monde
La combinaison évoquée par M. Roth fait partie de la famille des systèmes énergétiques « hybride ». Un système hybride souvent cité est celui des panneaux photovoltaïques flottant sur les réservoirs hydroélectriques, dont le déploiement à grande échelle permettrait de générer des milliers de térawattheures par année dans le monde, selon une étude américaine. Pour l’instant, il semble toutefois que les systèmes hydroéoliens (sur un même site géographique) soient plutôt rares dans le monde.
Notons néanmoins qu’en 2016, l’entreprise GE Renewable Energy disait travailler sur un projet en Allemagne, où le pied d’éoliennes devait servir de réservoir contenant des millions de litres d’eau. Grâce à l’énergie du vent, on pourrait y pomper de l’eau, qui serait ensuite relâchée vers une centrale hydroélectrique au moment propice. (Contactée par Le Devoir, l’entreprise n’était pas en mesure de confirmer que le projet était bel et bien allé de l’avant, sept ans après son annonce.)
Ajoutons que, dans le sud de l’Europe, on commence à penser à l’énergie éolienne pour donner un coup de pouce aux centrales hydroélectriques, dont le rendement pourrait fléchir de 15 % à 20 % si le thermomètre mondial grimpe de 3 °C. Des chercheurs s’efforcent donc d’évaluer s’il vaudrait la peine d’installer des éoliennes près des barrages existants, souvent situés au creux des vallées montagneuses dans cette région du monde.
Des questions ? Écrivez-nous !