Nouveau sommet de ventes de pesticides au Québec

Les ventes de pesticides ont atteint un record historique en 2021, passant au-dessus de la barre des 5 millions de kilogrammes d’ingrédients actifs. Malgré certaines avancées, le plus récent bilan des ventes de pesticides montre que des efforts supplémentaires devront être faits pour atteindre les objectifs fixés par le gouvernement.
Fait notable, c’est en milieu urbain où la hausse a été la plus grande en proportion, selon ces nouvelles données publiées par Québec. « Ces ventes ont plus que doublé par rapport à 2019 ». Cette augmentation est attribuable à l’utilisation de la farine de gluten de maïs, un biopesticide notamment utilisé pour tuer les pissenlits, dont les ventes ont été multipliées par cinq depuis 2019.
C’est cependant le milieu agricole qui compte pour la plus grande part du bilan total (72 %), comme chaque année. En agriculture, la remontée du glyphosate a ramené les ventes au niveau moyen des cinq dernières années. À lui seul, cet herbicide représente 48 % des ventes. Le total pour ce secteur s’est chiffré à 3,6 millions de kilogrammes en 2021, ce qui correspond à la moyenne des cinq années antérieures.
Publié discrètement plus tôt cette semaine et sans communiqué par le ministère de l’Environnement, ce document comporte tout de même certaines lueurs d’espoir. Depuis 2018 dans la province, cinq ingrédients actifs ne peuvent être utilisés à moins d’avoir été « prescrits » ou justifiés par un agronome. Mis ensemble, ces ingrédients ont vu leur vente diminuer de près de 60 % depuis lors, ce qui démontre l’effet de ces prescriptions et justifications.
Les néonicotinoïdes, accusés d’être des « tueurs d’abeille », sont de moins en moins utilisés pour enrober les semences, une pratique qui a été démontrée comme peu utile. « On estime que moins de 0,5 % des superficies seraient semées avec du maïs enrobé de néonicotinoïdes, comparativement à 100 % en 2015 », est-il écrit dans le bilan.
Les ventes d’atrazine, un herbicide utilisé dans la culture du maïs, « présentent ainsi une réduction globale de 90 % depuis la mise en oeuvre » de ce système. La vente de chlorpyrifos, un autre pesticide sous prescription, a par ailleurs été interdite en décembre 2022, après une décision de l’Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire de Santé Canada.
Vers les objectifs du gouvernement ?
Le bilan 2021 au Québec porte également une attention aux produits de remplacement potentiels de ces pesticides maintenant moins accessibles. Un récent projet de règlement a d’ailleurs le potentiel d’étendre les prescriptions agronomiques à la famille des diamides. Ces insecticides ont remplacé en partie les néonicotinoïdes pour l’enrobage des semences, mais ils ont d’importants impacts sur la faune aquatique.
Le secteur agricole a entrepris des efforts considérables dans les dernières années pour réduire sa dépendance à l’utilisation des pesticides, notamment grâce à la rétribution des pratiques agroenvironnementales. Une enveloppe de 85 millions de dollars a été annoncée en février par le ministre André Lamontagne, entre autres pour récompenser les producteurs agricoles qui réduisent leur usage des pesticides.
Au-delà des quantités, l’indice de risque pour la santé a descendu de 16 %, mais celui pour l’environnement a augmenté de 12 % par rapport à la période de référence utilisée (2006-2008). La toxicité varie selon les produits utilisés : en d’autres mots, une même quantité d’herbicide ou d’insecticide ne pose pas le même danger et il faut donc calculer cet indicateur à part.
La cible à l’horizon de 2030, indiquée au Plan d’agriculture durable, était plutôt de réduire le risque de 40 % ces deux indicateurs en agriculture.
Quant à la quantité vendue, la cible très ambitieuse de 2,5 millions de kilogrammes s’applique uniquement à la production agricole, soit encore 1,1 million de kilogrammes sous la barre actuelle.
Les quantités recensées incluent les pesticides conventionnels (ou « de synthèse ») et les biopesticides. Même s’ils sont issus de sources naturelles, ils ne sont pas sans risque pour l’équilibre des écosystèmes et de la biodiversité.
Parmi tous les usages en milieu urbain, c’est l’usage domestique des pesticides pour le jardinage qui occupe la plus grande partie des ventes, suivi par l’entretien des espaces verts et des terrains de golf. Québec compte interdire plus de 60 pesticides en milieu urbain, mais pas le glyphosate.
Une version précédente de ce texte, qui indiquait que la vente d’atrazine a été interdite en décembre 2022, a été modifiée.