Steven Guilbeault défend la hausse des claims miniers au Québec

Le ministre fédéral de l’Environnement, Steven Guilbeault, ne croit pas que la hausse importante du nombre de titres d’exploration de gisements potentiels accordés par Québec dans les deux dernières années est incompatible avec la lutte contre les changements climatiques. Au contraire, ces claims sont nécessaires dans un contexte d’électrification des transports, fait-il valoir. Des propos que critiquent des environnementalistes.
« Je ne crois pas que ça va à contre-courant » de notre lutte contre les changements climatiques. « Le boom minier qu’on voit est très lié à nos efforts collectifs de nous libérer de notre dépendance aux combustibles fossiles, ce qui passe par l’électrification des transports. Or, pour électrifier, on a besoin de minéraux, dont des minéraux critiques », a déclaré M. Guilbeault mercredi matin lors d’une mêlée de presse tenue en marge du Sommet climat Montréal.
Le ministre a d’ailleurs rappelé que ces projets miniers, avant de prendre forme, « vont devoir passer par le prisme d’une évaluation environnementale très rigoureuse » afin de s’assurer que leurs impacts sur les milieux naturels sont limités. « Alors oui, si on veut se libérer de notre dépendance au pétrole et aller vers l’électrification et qu’on veut avoir nos iPhone et nos ordinateurs, nous avons besoin de ces minéraux critiques là, mais il faut bien le faire », a ajouté le ministre.
Des propos critiqués
Or, « ce qui est évident, c’est qu’on ne peut pas prétendre faire des mines d’avenir avec des lois du passé », rétorque le co-porte-parole de la Coalition Québec meilleure mine Rodrigue Turgeon.
En entrevue au Devoir, ce dernier fait valoir que l’encadrement du secteur minier mis en place par le gouvernement du Québec « bafoue les droits ancestraux des Autochtones », les claims miniers étant accordés sans consulter ceux-ci au préalable. Il y a d’autre part « très peu d’inspections environnementales qui sont faites de manière indépendante » sur les sites destinés à des projets miniers, relève-t-il.
« Et je n’ai même pas abordé le fait que les municipalités ne sont pas informées en amont de la remise de claims miniers » sur leur territoire, renchérit M. Turgeon.
Il y a des claims miniers qui viennent bloquer à part entière la réalisation de projets d’aires protégées
Ce dernier trouve ainsi « assez discutable » que le ministre Guilbeault ne remette pas en question la façon dont la délivrance de claims miniers est effectuée au Québec. D’autant plus, affirme-t-il, qu’une part importante des titres d’exploration accordés dans le secteur minier au Québec ne concernent pas des minéraux critiques utilisés entre autres dans l’électrification des transports.
Au cours des deux dernières années, le nombre de détenteurs de claims miniers a augmenté de 65 %, ce qui soulève des inquiétudes dans plusieurs municipalités où ces droits exclusifs de procéder à des travaux de recherche de substances minérales ont été accordés.
Ces titres, qui permettent l’exploration minière sur une superficie totale de16 millions d’hectares du territoire québécois, préoccupent notamment la Société pour la nature et les parcs du Québec, qui craint que ceux-ci aient pour effet de bloquer plusieurs projets d’aires protégées. Ces permis couvrent par ailleurs des milliers de kilomètres carrés d’habitats du caribou.
« Il y a des claims miniers qui viennent bloquer à part entière la réalisation de projets d’aires protégées et qui soulèvent énormément d’enjeux au niveau de l’acceptabilité sociale », rappelle ainsi le porte-parole de Greenpeace Canada, Patrick Bonin, rencontré par Le Devoir pendant le Sommet climat Montréal.
Par ailleurs, tout en reconnaissant le rôle du secteur minier dans l’électrification des transports, l’expert estime que la priorité des autorités publiques devrait être, à la base, d’inciter les citoyens à utiliser moins leur voiture. « On ne peut pas simplement vouloir autant de véhicules et échanger les véhicules à essence par des véhicules électriques parce qu’il y a des impacts à la production qui sont majeurs, notamment au niveau des GES. Il faut décroître le parc automobile en général » au profit du transport en commun et actif, affirme M. Bonin.
Troisième lien
À ce sujet, le ministre Guilbeault a rappelé que ce sont « 300 projets de transport collectif » qui sont actuellement en construction au pays, « dont plusieurs ici à Montréal ».
Il faisait ainsi référence, entre autres, au prolongement de la ligne bleue du métro jusqu’à Anjou et au Réseau express métropolitain, dont le premier tronçon entrera en fonction dans les prochaines semaines.
Quant au troisième lien envisagé entre Québec et Lévis, qui devrait finalement être réservé au transport en commun, Ottawa n’est pas contre l’idée de le financer. Mais encore faut-il qu’un projet précis lui soit soumis, a évoqué Steven Guilbeault. « On verra ce que le gouvernement du Québec présentera au fédéral comme projet, mais pour l’instant, il n’y a toujours rien qui a été déposé. »