Les émissions de méthane seraient sous-estimées en Saskatchewan

De nouvelles recherches menées avec une technologie de pointe suggèrent que les installations de pétrole lourd en Saskatchewan rejettent près de quatre fois la quantité d’un puissant gaz à effet de serre qu’elles déclarent au gouvernement.
La recherche, publiée dans la revue scientifique Environmental Science and Technology, présente de nouvelles méthodes de mesure des émissions de méthane qui remettent en question les pratiques actuelles de l’industrie, explique son auteur, Matthew Johnson, qui est professeur d’ingénierie à l’Université Carleton d’Ottawa.
« Beaucoup de rapports sont fondés sur des estimations, déplore M. Johnson. De toute évidence, ils ne sont pas très précis. »
Le méthane est un sous-produit de la production de pétrole. Il est souvent considéré comme un gaz à effet de serre 25 fois plus puissant que le dioxyde de carbone. L’industrie et le gouvernement tentent de réduire ces émissions des trois quarts, mais il est difficile d’en mesurer l’ampleur.
« Ce sont des mesures difficiles à prendre », reconnaît M. Johnson.
L’industrie s’appuie généralement sur une estimation de la quantité de méthane qui remonte à la surface pour chaque baril de pétrole, puis multiplie cette mesure par la quantité de pétrole produite. Ces dernières années, plusieurs études utilisant des mesures directes à partir d’aéronefs en survol ont remis en cause cette méthode.
M. Johnson souligne que la quantité de méthane associée au pétrole est très variable, ce qui rend les calculs basés sur ce rapport peu fiables.
M. Johnson et ses collègues ont utilisé la plus récente technologie aéroportée ainsi que des capteurs au sol pour mesurer les émissions de méthane de 962 installations de pétrole lourd en Saskatchewan.
Ils ont découvert que ces sites rejetaient 3,9 fois plus de méthane que ce qui avait été signalé dans les données gouvernementales. Cela représente plus de 10 000 kilogrammes par heure, par rapport aux estimations de l’industrie de près de 2700 kilogrammes par heure.
« Ce méthane, à lui seul, serait une contribution importante à l’ensemble de l’inventaire de la Saskatchewan », mentionne M. Johnson.
L’importance d’être précis
Obtenir une idée précise de la quantité de méthane rejetée par l’industrie dans l’atmosphère est important pour plusieurs raisons, selon M. Johnson.
Premièrement, l’industrie et le gouvernement fédéral ont convenu de réduire ces émissions de 75 % d’ici 2030. Des règlements pour atteindre cet objectif sont attendus cette année et il sera crucial de mesurer un point de départ précis.
Deuxièmement, M. Johnson affirme que l’obtention d’une analyse fiable, puits par puits, des émissions sera importante pour l’industrie à l’avenir.
Les émissions de méthane ne sont pas soumises aux mêmes taxes que les rejets de dioxyde de carbone, mais cela est en train de changer. Les États-Unis envisagent de mettre un prix sur le méthane rejeté en vertu de leur loi sur la réduction de l’inflation.
De bonnes informations seront essentielles pour savoir quels puits resteront rentables à mesure que de tels régimes de prix se répandront, explique M. Johnson.
« Si vous ajoutez un prix sur le méthane, beaucoup de ces puits ne seront pas rentables. »
Cependant, les calculs de M. Johnson suggèrent que le coût de la réduction de ce méthane est suffisamment bas pour que les entreprises n’aient besoin que de deux ans pour faire leurs frais. Et si la valeur du pétrole produit est incluse, la période de récupération tombe à neuf mois pour de nombreux puits.
Même brûler le méthane aiderait, indique M. Johnson.
« Le simple fait d’installer une technologie de base d’atténuation de la combustion ne sera pas un facteur décisif pour le puits, et vous pouvez obtenir des réductions de méthane assez importantes. »