Québec pourrait revoir l’octroi des titres miniers

Le gouvernement dit vouloir être à l’écoute de la population pour que le développement minier « se fasse de façon harmonieuse » au Québec.
iStock Le gouvernement dit vouloir être à l’écoute de la population pour que le développement minier « se fasse de façon harmonieuse » au Québec.

Après deux années de boom d’acquisition de permis d’exploration minière dans plusieurs régions du Québec, le gouvernement Legault lance finalement des consultations sur l’encadrement de cette industrie. Il ouvre d’ailleurs la porte à une révision de la façon dont sont octroyés les « claims » et à une meilleure protection des « milieux fragiles » qui sont convoités par les minières.

« Depuis ma nomination, j’entends parler d’enjeux en lien avec les claims miniers et notre gouvernement s’était engagé à ce qu’il y ait des mines, mais dans un contexte d’acceptabilité sociale. Je veux donc entendre la population pour m’assurer de répondre aux préoccupations et trouver des solutions », a résumé vendredi la ministre des Ressources naturelles et des Forêts, Maïté Blanchette Vézina, en entrevue au Devoir.

Dans le cadre des « ateliers participatifs » prévus dès le mois d’avril, la ministre dit vouloir aborder plusieurs « thèmes », dont l’octroi des titres miniers, « la protection des milieux fragiles », « l’harmonisation » des activités minières sur le territoire et « l’acceptabilité sociale ». « Je veux entendre ce que les gens vivent et ce qu’ils ont comme expérience, pour qu’on puisse ajuster les choses et que le développement se fasse de façon harmonieuse », précise-t-elle.

À l’heure actuelle, il est possible d’acquérir directement sur le Web des permis d’exploration minière selon un système que le gouvernement qualifie lui-même de « facilement accessible ». Est-ce que Québec pourrait modifier ce régime, qui a été souvent critiqué par les municipalités et différentes organisations de la société civile ? « Tout est sur la table », assure Mme Blanchette Vézina, qui dit vouloir « moderniser » le régime minier dans un contexte de « développement de la filière batterie ».

« Nous saluons les consultations auxquelles nous participerons, de même que l’engagement du gouvernement de modifier l’encadrement minier actuel, mais nous réitérons l’urgence d’instaurer un moratoire sur l’octroi de nouveaux claims miniers afin de ne pas aggraver la situation, le temps qu’on révise les règles actuelles », ont déclaré conjointement la Coalition Québec meilleure mine et MiningWatch Canada.

Selon ces deux organisations, la méthode actuelle d’octroi des permis d’exploration permet d’en acquérir en seulement 30 minutes, à condition d’avoir accès à Internet et d’assumer les coûts, soit quelques dizaines de dollars, en payant avec une carte de crédit. Résultat : on compte aujourd’hui 275 387 permis d’exploration en vigueur. Ils couvrent plus de 140 000 km2 du territoire québécois.

Boom de permis

Les consultations gouvernementales surviennent dans un contexte où les claims miniers se multiplient dans différentes régions du Québec depuis deux ans, selon des données officielles comptabilisées par la Coalition Québec meilleure mine.

En Abitibi-Témiscamingue, la région la plus convoitée de la province, on comptait 43 223 titres en décembre 2022, soit une augmentation de 37 % en deux ans. Dans le sud-ouest du Québec (en incluant l’Outaouais, les Laurentides, Lanaudière et la Mauricie), on comptait 17 642 permis d’exploration en janvier 2023 et une hausse de 129 % des titres pour la seule période 2021-2022.

Dans le sud-est (Estrie, Bas-Saint-Laurent et Gaspésie), la hausse a atteint 107 % en deux ans, pour un total de 7674 titres. Mais l’augmentation a été plus forte en Gaspésie, où elle a atteint les 139 %. Dans ces régions, les cartes des permis d’exploration permettent de constater que plusieurs chevauchent des zones protégées, des rivières, des forêts anciennes ou encore des habitats fauniques importants, principalement en Gaspésie.

De nombreux titres miniers se trouvent aussi aux limites de parcs nationaux, dont le parc Forillon, celui du mont Mégantic et celui de la Gaspésie. Ce parc national créé par le gouvernement du Québec est bordé de permis au sud, au nord et à l’est. Fait à noter : les parcs nationaux sont présentés comme des « contraintes à l’exploration minière » sur les cartes du ministère des Ressources naturelles et des Forêts, tout comme certaines zones urbanisées telles que l’île de Montréal, Laval et Québec.

Dans ce contexte de hausse de l’engouement des minières pour le sud de la province, la Fédération québécoise des municipalités a interpellé les élus à Québec en demandant au gouvernement de « reconnaître la préséance des schémas d’aménagement sur les autres planifications territoriales pour assurer le respect des intérêts de nos collectivités ».

L’Union des municipalités du Québec a également plaidé pour une conciliation « plus harmonieuse » des activités minières « avec les leviers économiques que sont la villégiature et le tourisme, et ce, tout en nous assurant de renforcer la sécurité et la qualité de vie de la population ».

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