Comment parler d’environnement aux enfants?

Se rapprocher de la nature, comme le faisaient ces enfants l’été dernier sur une plage de Gaspésie, illumine les perspectives sur l’environnement.
Francis Vachon Archives Le Devoir Se rapprocher de la nature, comme le faisaient ces enfants l’été dernier sur une plage de Gaspésie, illumine les perspectives sur l’environnement.

Ce texte est tiré du Courrier de la planète du 15 novembre 2022. Pour vous abonner, cliquez ici.

Les scientifiques anticipent un avenir lugubre pour la planète et sa beauté, sa biodiversité, voire sa viabilité. Une lectrice, Stéphanie Couture, nous demande comment parler d’environnement aux enfants sans les effrayer quant au monde qui les attend.

Le Devoir a posé la question à des mères, à des auteurs, à une psychologue et à une enseignante pour savoir comment aborder le péril à venir sans apeurer — ou décourager — les adultes de demain.

En bas âge, un enfant ne devrait pas avoir à porter le poids du monde sur ses épaules, croit la psychologue Ines Lopes. « [Avec les enfants] très jeunes, il ne faut pas nécessairement aborder l’environnement sous l’angle de ses problèmes. Il s’agit plutôt de cultiver une connexion avec la nature et un sentiment de gratitude envers elle. »

« Ce n’est pas du déni, précise la Dre Lopes. C’est juste qu’un enfant de moins de 10 ans n’a pas nécessairement besoin d’entendre parler de la sixième extinction. »

C’est l’approche que Mireille Levert a préconisée dans son conte pour enfants Un jour je bercerai la Terre. L’autrice et illustratrice a voulu écrire un « long poème à la nature » pour en célébrer la beauté, et non pour raconter les menaces qui assombrissent son horizon. « Nous parlons toujours de tout ce qui ne marche pas, mais pour moi, même si je suis une grande amatrice de culture, la nature garde une beauté vraiment dure à battre. »

Mère et porte-voix de la cause écologiste au Québec, Laure Waridel croit aussi qu’il faut d’abord amener les enfants à côtoyer la nature et à s’émerveiller devant elle. Quand les siens étaient en bas âge, explique-t-elle, elle a surtout tenté de développer « un lien d’amour » entre eux et la nature.

« Nous prenons soin de ce que nous aimons et pour aimer, il faut connaître », croit-elle. Excursions en forêt, balades au bord de l’eau, séances d’observation des fleurs, des plantes, des oiseaux : voilà autant d’occasions de « cultiver un regard pour la beauté du monde », selon Laure Waridel, pour qu’il perdure une fois qu’on est à l’âge adulte.

Incarner l’exemple

Les enfants entendent les nouvelles et s’imprègnent de l’état du monde exposé à la radio, à la télé et dans les conversations d’adultes. « Ce sont des éponges, ils sont très perméables aux angoisses qui les entourent », assure quant à elle Lucie Sauvé, professeure à l’UQAM et membre émérite du Centre de recherche en éducation et formation relatives à l’environnement et à l’écocitoyenneté.

Il faut éduquer les enfants à la beauté du monde, croit la chercheuse, mais il faut surtout « les écouter et les inviter à prendre la parole, à exprimer ce qu’ils savent et ce qu’ils ressentent » à propos de la nature.

« Même enfants, ce sont des écocitoyens, capables d’être critiques des agissements dont ils sont témoins, assure Mme Sauvé. Ils trépignent à la porte de la vraie vie et sont eux-mêmes acteurs de leur monde. »

Même si les bouleversements climatiques n’augurent rien de bon pour l’humanité — le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, traçant même un parallèle entre l’inaction et un « pacte de suicide collectif » en ouverture de la COP27 —, il importe d’inculquer un « pouvoir-faire » aux enfants. « Il faut, selon Lucie Sauvé, leur apprendre qu’ils peuvent avoir un impact. »

Membre du collectif Mères au front, Laure Waridel croit que les parents devraient également prêcher par l’exemple auprès des enfants. « Ramasser un déchet par terre avec eux, recycler, fermer l’eau pendant le brossage de dents : ce sont de petits gestes qui sensibilisent et qui montrent qu’ils peuvent agir. »

Il importe aussi, selon la psychologue Ines Lopes, de donner l’heure juste aux enfants. « Quand ils posent une question ou soulèvent un problème, il ne faut pas leur cacher la vérité, mais il faut aussi leur parler des solutions pour déjouer le sentiment d’impuissance et de fatalité. »

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